défini la souveraineté : la puissance suprême, summum intperium summa potestas, qu’il attribue au roi, confondant, suivant l’usage de l’époque, l’État avec le monarque. On a basé sur ses écrits l’absolutisme royal. — En 1789 le roi est dépossédé du pouvoir par la nation, dont on essaie de légitimer les droits par la métaphysique du Contrat social[1].
Mais le droit comme toute chose subit continuellement une évolution ; il n’est qu’une sorte d’armature de la vie sociale, et comme telle il suit parallèlement révolution sociale, chose infiniment complexe et qui dure indéfiniment. Le système de droit public de la révolution française, sur lequel pendant un siècle ont vécu tous les peuples civilisés, reposait sur deux idées essentielles : l’idée de la souveraineté de l’État, ayant pour titulaire originaire la nation personnifiée ; l’idée du droit naturel inaliénable, imprescriptible, de l’individu, s’opposant au droit souverain de l’État. C’est un système subjectiviste, puisque au droit subjectif de l’État il oppose le droit subjectif de l’individu et fonde sur celui-ci la limitation de la souveraineté et les devoirs qu’il impose à l’État. C’est un système métaphysique puisqu’il repose essentiellement sur la conception du droit subjectif, ce qui est certainement d’ordre métaphysique. C’est enfin un système impérialiste ou régalien puisqu’il implique que les gouvernements exercent toujours la puissance commandante ; l’imperium de la nation organisée en État.
L’évolution de ces idées, dans une société toute pénétrée de positivisme, a fait comprendre d’abord que si le droit de puissance publique ne peut s’expliquer par une délégation donnée, il ne le peut davantage par une délégation nationale. Ce n’est là qu’une fiction, la volonté nationale se résolvant en celles de quelques individus. L’homme ne peut avoir des droits naturels, individuels, parce qu’il est par nature un être social ; si l’homme a des droits il ne peut les tirer que du milieu social et non les lui imposer. D’autre part, les transformations économiques de la société, survenues surtout pendant la deuxième moitié du XIXe siècle, ont substitué une économie nationale à l’économie domestique. Seuls de vastes organismes peuvent donner satisfaction à la masse des besoins élémentaires. L’interdépendance sociale est devenue si étroite que le fait que quelques-uns ne remplissent pas leur besogne réagit sur tous les autres. Il est des besoins d’une impor-
- ↑ L’exposé de ces idées a été fait au Congrès international des sciences administratives, Bruxelles, 1910. On le trouvera développé dans l’ouvrage de Léon Duguit, Les transformations du droit public, 1913, auquel on a emprunté les passages ci-dessus. Voir aussi : Haurion, Principe du droit public, 1910, pages 78 et 79. — Berthelemy 7{{}e|me} édition. 1913, pages 41 et 42. Voir aussi la Critique du dogme de la souveraineté par Auguste Comte. — Deherme, Les théoriciens de l’Action française et du syndicalisme révolutionnaire (exposé dans le livre de Guy Grand, Le procès de la démocratie). — Esmein, Droit constitutionnel, 5me édition, 1909. — Laband, Droit public, édition française, 1900.