Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/389

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un être éminemment susceptible et ombrageux. Il doit avoir un sentiment de l’honneur développé au plus haut point et si offensé, il n’obtient pas satisfaction immédiatement, il doit déclarer la guerre.

5me Conséquence : Pas d’État sans puissance. Ce qui constitue essentiellement l’État est la Puissance : « Der Staat ist Macht ». Pour pouvoir jouer son rôle, pour contenir les velléités d’empêchement des autres États, imposer sa loi sans en subir aucune, il faut qu’il possède de puissants moyens d’action.

6me Conséquence : L’armée, réalisation de l’État. C’est l’armée qui fait d’abord et avant tout cette puissance. Elle est la force physique de la nation. De là une place tout à fait à part doit lui être faite dans les institutions de la nation. Ce n’est pas seulement un service public de première importance, c’est la pierre angulaire de la société, c’est l’État incarné. Sans doute il faut aussi à l’État des esprits clairs et justes pour conduire la politique, dont la guerre n’est que la forme violente ; mais toutes ces qualités morales ne sont pas recherchées pour elles-mêmes : elles ne sont que des moyens en vue de donner à l’armée son maximum d’efficacité, car c’est par l’armée que l’État réalise son essence (Principes même du militarisme).

7me Conséquence : Plus de petits pays. Les petits pays sont destinés à disparaître. En effet, les États ne méritent d’être appelés ainsi que dans les mesures où ils sont réellement puissants, puisque l’État se défend par la puissance. Les petits pays, ceux qui ne peuvent se défendre et se maintenir par leurs seules forces, ne sont pas de véritables États, car ils n’existent que par la tolérance des grandes puissances. Ils n’ont et ne peuvent avoir qu’une souveraineté nominale.

8me Conséquence : Pas de morale liant l’État. La morale n’impose pas ses fins à l’État, lequel trouve sa propre force en lui-même. La morale peut être pour l’État un moyen. Il n’y a pas opposition nécessaire entre la morale et l’État. Il peut y avoir intérêt à la respecter, il peut être impolitique d’y contrevenir, mais s’il y a conflit l’intérêt de l’État passe avant tout. D’ailleurs la morale (morale chrétienne) n’est plus un catalogue d’actes bons ou mauvais en soi. L’intention de l’agent crée la moralité de l’acte. La hiérarchie des devoirs ne saurait être la même pour l’État et pour les particuliers. L’État étant essentiellement puissant le devoir est pour lui de développer sa nature de puissance. Le pire des péchés politiques c’est le péché de faiblesse.

9me Conséquence : La fin justifie les moyens. Puisque l’accroissement de son pouvoir est pour l’État la seule fin qu’il doive poursuivre, dans le choix des moyens nécessaires pour atteindre cette fin il ne doit être déterminé que par leur adaptabilité au but poursuivi. Tous les moyens qui mènent au but sont légitimes et l’État n’a pas ici à respecter les règles de la morale commune. L’homme d’État, pour atteindre les fins de puissance de l’État peut donc tuer, terroriser, mentir, ruser, cor-