Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/39

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à l’Autriche-Serbie. L’Allemagne a ignoré l’ultimatum de l’Autriche, et celle-ci avait déclaré qu’elle respecterait l’indépendance et l’intégrité de la Serbie. Il y a eu convention navale entre l’Angleterre et la Russie, au commencement de juillet 1914. C’est l’appui militaire promis à la Russie par l’Angleterre qui aurait provoqué les intransigeances de celle-ci et rendu ainsi inévitable la guerre mondiale. Dans la préface du Livre blanc, le gouvernement allemand expose cette manière de voir, mais on a fait observer les omissions méthodiques opérées dans ce livre[1].

Les Empires du centre n’ont vraiment rien à répondre aux conclusions suivantes de l’acte d’accusation que l’on peut dresser contre eux : 1. Ils se sont préparés à la guerre (militarisme). 2. Ils ont voulu la guerre (ultimatum et déclaration de guerre). 3. Ils n’ont consenti depuis des années à aucun des sacrifices qui auraient pu amener des arrangements amiables (dureté dans le traitement de l’Alsace-Lorraine, insatiabilité après la cession du Congo, après l’annexion de la Bosnie-Herzégovine ; échec imputable à l’Allemagne des tentatives d’arrangements directs anglo-allemands). 4. Ils se sont opposés systématiquement à tout essai de méthodes juridiques pour aplanir les conflits (attitude aux deux conférences de la Haye, refus en 1914 de discuter en conférence ou de soumettre le conflit serbe à l’arbitrage). 5. Ils ont érigé en théorie systématique, publiquement professée, la doctrine de la suprématie de la force sur le droit, ou plus exactement de l’identification de la force et du droit (littérature pangermaniste, manifeste des intellectuels allemands). 6. Ils ont fait de cette théorie une doctrine de gouvernements (violation de la neutralité de la Belgique et du Luxembourg, méthode suivie dans l’occupation de ces pays. Déclaration cynique faite à leur sujet[2]). 7. Ils ont depuis itérativement affirmé des volontés de conquête signifiant non seulement une maîtrise de souveraineté sur le territoire, mais une appropriation de la fortune publique et privée, un asservissement des populations à vaincre (discours de l’Empereur et du Roi de Bavière, mémoires des

  1. Discours du chancelier du 2 décembre 1914 — Grey, à la Chambre des Communes, le 28 octobre 1915, en réponse à une question, a nié le fait d’une entente Anglo-russe avant le 14 septembre 1914. Récemment (novembre 1915), à la tribune française, Briand a déchiré : « La France n’a pas troublé la paix. Résistant à toutes les provocations, elle a tout fait pour la maintenir. Elle est victime d’une agression préméditée qu’aucun sophisme ne parviendra jamais à justifier. On lui imposa la guerre, elle l’accepta sans peur, et elle ne s’arrêtera que quand l’ennemi aura été réduit à l’impuissance. »
  2. Les Allemands ont prétendu que la Belgique avait elle-même cessé d’être neutre par une entente qu’elle aurait conclue avec l’Angleterre en 1906. Ils ont publié à ce sujet des documents trouvés dans les archives de Bruxelles. Ces documents « truqués » ne prouvent rien. L’accusation d’après coup ne prévaut pas contre la déclaration claire du Chancelier, le 4 août 1914. (Waxweiler, La Belgique neutre et loyale.)