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Comme faits, il y a lieu de constater qu’aujourd’hui trois villes, dont deux placées en pays conventionnellement neutres, se partagent le siège de la plus grande partie des institutions internationales existantes : Berne (Suisse), Bruxelles (Belgique), La Haye (Pays-Bas). Des projets ont proposé la création d’une cité internationale nouvelle distincte de toute ville existante. Des projets ont décrit aussi la conception et le fonctionnement d’un centre mondial[1].

L’histoire nous offre des solutions variées au problème des capitales, mais toutes sont une confirmation de l’importance même et du rôle des villes capitales. Le siège des institutions nationales est tantôt concentré, tantôt divisé. En Suisse, Berne est le siège des autorités fédérales et Lausanne le siège du Tribunal fédéra). En Allemagne, le Reichstag siège à Berlin et le Tribunal impérial a Leipzig.

Le gouvernement de certains pays siège alternativement dans les grandes villes. Ainsi les délégations de la monarchie austro-hongroise siègent successivement à Vienne et à Budapest. Quelques pays ont créé spécialement des villes comme capitales gouvernementales et les ont situées dans des zones soumises à un régime particulier. Ainsi le district de Colombie avec Washington aux États-Unis. Les républiques sud-américaines offrent des exemples analogues.

Dans le passé Rome a été une ville internationale. Les pèlerinages y étaient devenus très fréquents dès la fin du XIIIme siècle. Boniface VII fit alors annoncer une indulgence plénière pour tous les pèlerins qui se rendaient à Rome, mais aux conditions ordinaires de repentir et de confession. (Peut-être cette indulgence jubilaire date-t-elle déjà de l’an 1000, moment ou la fin du monde était généralement attendue.) Des multitudes immenses se pressèrent alors dans les murs de la ville. Les papes Clément VI, Urbain VI et Paul II (1468) réduisirent successivement à 50, 30 et 25 ans au lieu de 100 l’intervalle des jubilés. Les pèlerins étaient obligés de séjourner quinze jours à Rome, cause d’une dépense qui n’était pas médiocre. Les offrandes étaient si abondantes qu’on les tirait des troncs au moyen de râteaux et qu’on put comparer les jubilés aux pèlerinages des juifs à Jérusalem. Rome était alors dans sa plus haute splendeur ; ou s’estimait heureux d’entreprendre ce voyage et de voir de ses propres yeux le centre qui reliait toutes les nations de la terre[2]. Elle offre un exemple de ce que pourrait devenir avec le temps une grande capitale internationale, siège des grandes institutions politiques, intellectuelles et économiques.

  1. Voir le projet de l’Union des Associations internationales dans les actes du Congrès mondial, 1913, page 1.
  2. Moehler, Histoire de l’Église, II, p. 575. — À la question de la capitale se rattache celle d’un drapeau international ; plusieurs propositions ont été faites.