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LE LIVRE ET LE DOCUMENT

ses auditeurs lui témoignaient une reconnaissance proportionnelle à l’intérêt des nouvelles qu’il apportait.

b) La Conférence des Experts de Presse (août 1927) a commencé à synthétiser les éléments relatifs aux nouvelles, comment les recueillir et assurer la transmission rapide, la protection avant et après la publication, la diffusion intensive. Une fois entré dans cette voie féconde, on peut entrevoir comme développement logique le besoin accru de documentation sûre, rapide, complète ; la nécessité d’envisager d’autres moyens de diffusion de la vérité, de les étendre non seulement aux nouvelles au sens journalistique du mot (informations du jour), mais aux articles et surtout aux données mêmes sur lesquelles reposent les faits intéressant la vie internationale.

c) On n’a pas encore défini la fausse nouvelle. C’est là une matière fluide, éphémère et délicate à saisir. Parfois on est en présence de nouvelles tendancieuses, déformées ou inspirées, parfois telle nouvelle se voit donner une importance disproportionnée. On connaît les interminables discussions à Genève sur la définition de l’agresseur ! Une étude historique de l’effet des nouvelles de presse sur l’opinion publique aux périodes critiques est reconnue désirable.

La question des fausses nouvelles a été soulevée à la S. D. N. Comment réduire ou éliminer ces fausses nouvelles dont l’effet est d’irriter l’opinion publique. L’aversion unanime des Journalistes et des Associations de Presse s’est manifestée non seulement à l’égard de l’intervention gouvernementale, mais à l’égard de toute intervention extérieure. Il faut tenir compte du prix que le public est disposé à payer pour les nouvelles. La majorité du public ne payerait pas les nouvelles exigées au prix où celles-ci reviennent. Il faut donc que la publicité payée et les autres intérêts commerciaux viennent combler la différence. D’où une influence puissante qui tend à faire dévier les nouvelles de leur caractère d’objectivité complète. Une déclaration des Associations de Presse demande, dans l’intérêt de la Paix, que les industries d’armement ne soient pas autorisées à posséder ni à diriger indirectement des feuilles publiques. On a fait remarquer que l’absence de nouvelles était aussi préjudiciable que la fausse nouvelle. Le silence crée la peur, ce qui mène aux malentendus et en fin de compte à la haine.

d) On a proposé que la Société des Nations soit chargée de propager des nouvelles par elle contrôlées, par conséquent que la S. D. N. contrôle rapidement les nouvelles qui publiées déjà lui paraissent suspectes, qu’elle dispose d’un organe qui serait l’auxiliaire de ceux qui existent et en qui le monde pourrait avoir confiance.[1]

e) Il a été créé récemment un tribunal d’honneur des journalistes chargé de trancher les litiges mettant en jeu un intérêt international. Il est compétent pour sanctionner d’une sorte de flétrissure morale les auteurs de renseignements volontairement erronés et ceux mêmes qui ont mis un soin insuffisant à se documenter. Il ne peut toucher ni aux doctrines, ni aux idées, mais il a pour but de maintenir la notion d’honneur dans les relations entre journalistes étrangers.[2]

f) À la Table Ronde de l’Union des Associations Internationales, M. Briantchaninoff, l’organisateur des Congrès Psychosociologiques a présenté un projet de Cour Internationale privée destinée à s’occuper des affaires de Presse dans ses rapports avec l’opinion publique.

7. Documentation.

a) Le journal comme la revue a trois utilités documentaires : 1o on le lit quand il paraît ; 2o on en fait des collections (très peu) ; 3o on les découpe (beaucoup).

b) Il y a lieu de distinguer la documentation par la Presse quotidienne et la documentation de la Presse quotidienne : 1o la Presse quotidienne apporte les nouvelles en premier lieu, les articles de revue et les livres ne contenant la matière que beaucoup plus tard ; 2o elle contient des éléments qui se retrouveront plus tard dans les périodiques et les livres ; 3o elle contient l’expression immédiate de la pensée et de l’opinion publique à l’égard des événements ; 4o par les entrecoupements, les reproductions similaires ou les altérations, par les erreurs mêmes constantes dans une série d’articles publiés dans les journaux différents, on peut se rendre compte dès l’origine de certaines nouvelles, des sources qui les lancent et les paient (ex. Ivor Kreuger pour Ivan Kreuger).

Le journal comme documentation c’est : 1o l’actualité ; 2o la mise sur la trace du fait ; 3o un exposé court bien titulé ; 4o des articles de vulgarisation des questions ; 5o une matière abondante à bon marché.

c) Certains journaux dressent pour eux-mêmes la table des matières du contenu des numéros. Le Times publie les tables de son contenu.

d) Les Archives contemporaines (système Keesing) publient une documentation chronologique illustrée des événements mondiaux. La publication est hebdomadaire. Elle se fait en 4 langues. Un index alphabétique accompagne l’index cumulatif. L’index portant le numéro le plus élevé est seul à conserver, il reproduit en les commentant tous les précédents qui peuvent dès lors être détruits.

e) Des journaux publient des revues de la Presse dans lesquelles les articles sont cités textuellement, pour venir en aide à la presse et aussi pour leurs propres services. Le Ministère des Affaires étrangères de France a organisé un service de traduction de journaux étrangers et publié des Bulletins de Presse abondamment pourvus et présentés d’une manière assez objective.

f) Des journaux ont publié des éditions résumées. Ainsi les numéros hebdomadaires pour l’étranger de la Gazette

  1. Proposition de M. Jules Raisson au Comité français de Coopération européenne.
  2. Voir rapport P. Otlet au Congrès Psychosociologique.