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DISTRIBUTION DU LIVRE

Rivington remonte au XVIe siècle. Longman au XVIIe, Murray au XVIIIe.

d) Les transformations du monde de l’édition ont fait l’objet d’un ouvrage piquant de Bernard Grasse « La Chose littéraire », jadis les acheteurs de livres formaient une aristocratie : ils sont devenus une démocratie. La révolution s’est accomplie en France, surtout depuis 1919, depuis le jour où la publicité a commencé à être employée par les éditeurs au service des écrivains. Après la publicité, la mode bibliographique (c’est-à-dire le snobisme qui rapporte), les prix littéraires et les collections ont contribué à arrêter l’homme de la rue devant la vitrine du libraire. On a donc artificiellement multiplié les besoins de lecture et du même coup décuplé le nombre des ouvrages édités, on a fait de l’inflation littéraire. Les auteurs, au nombre de 3,700, sont réunis en syndicat. La critique a cessé d’être impartiale.

3. — Espèces.

a) il y a cinq grandes classes d’éditeurs : 1° les éditeurs proprement dits (offices, firmes, sociétés ou particuliers) qui font de l’édition sur une base commerciale ; 2° les éditeurs de revues, de journaux ; 3° les associations et institutions qui accessoirement éditent leurs publications ; 4° les gouvernements, les administrations publiques et institutions d’utilité publique ; 5° les particuliers.

b) Les associations et institutions ne poursuivent pas de but lucratif (sociétés spéciales, sociétés de bibliophiles, associations scientifiques, artistiques et littéraires). Ainsi la nouvelle « Maison de publication de la Christian Science » de Boston, dont l’édifice n’a pas coûté moins de 4 millions de dollars, est un centre d’édition (Christian Science Monitor, Christian Science Journal, Christian Science Sentinel et toute la littérature publiée par la société).

Des organismes politiques et sociaux sont éditeurs. En Hollande, par exemple, l’Arbeiderspers est une vaste concentration de toutes les éditions socialistes et ouvrières. Elle dispose de plus de 900 personnes, édite sept quotidiens, plusieurs hebdomadaires et journaux syndicaux, une revue mensuelle De Socialistische Gids, des livres de doctrine, des ouvrages scientifiques et des romans.

Les universités anglaises et américaines sont à la fois leur propre imprimeur et leur propre éditeur : Oxford University Press, The University of Chicago Press, The University Press, Cambridge. Il a été créé à Paris, depuis la guerre, une coopérative « Presses Universitaires de France ».[1]

Le monde scientifique se préoccupe du mode le plus économique de publication des travaux de science. Il envisage notamment la création d’imprimeries et de maisons d’éditions coopératives.

b) Certains auteurs sont leur propre éditeur. Ils passent eux-mêmes tous contrats en ce qui concerne impression, papier et reliure de leurs œuvres. La librairie dont le nom figure alors sur leurs livres n’est que leur distributeur. Ainsi de nos jours Bernard Shaw est son propre éditeur. Certains de ses roman » dépassent 70,000 exemplaires.

c) Autrefois les œuvres étaient dédiées à des mécènes. Aujourd’hui, il se constitue des comités de patronage ou des comités d’honneur formés de collectivité de noms ; on recourt aux associations et on publie « sous leurs auspices » ou bien on établit quelques relations entre l’ouvrage et les autorités officielles (ouvrage subventionné par…).

d) La « Book Society » a instauré le système suivant : tous les mois des épreuves de livres à paraître sont envoyées au comité de sélection de la société dont le choix est imposé par la majorité des votes. Les membres de la société reçoivent un exemplaire du livre choisi. Ils peuvent l’échanger contre un des ouvrages mentionnés dans la liste supplémentaire des volumes recommandés.

e) Les Soviets de Russie ont mis à la base de leur constitution l’auto-détermination des peuples. À l’ancien régime basé sur une seule culture, celle de la nation dominante, la Russie, ils ont substitué un régime de liberté de culture nationale. Il s’en est suivi l’édition intensive de littérature en langue nationale. À cette fin a été créé à Moscou l’organe dit « Édition Centrale des Peuples ». Il publie des livres en 42 langues différentes, entr’autres dans les langues des peuples éloignés, tels que Yakoutes, Tchouvaches, Ziriens, Ossetes, Occates, etc., peuples dont plusieurs ne possédaient pas l’écriture. Les syndicats (ils ont plus de 10 millions d’affiliés) possèdent une vaste presse et éditent une littérature de masses sur les questions les plus variées du mouvement syndical, du travail et de l’autodidaxie. Pour la diffusion de la musique dans les masses, le Gouvernement soviétique a entrepris une grande œuvre d’édition de musique concentrée au sein du secteur musical des éditions d’État.

f) Le Gouvernement mexicain a créé un Office d’Édition. Dépendant du Ministère de l’Instruction publique, il dispose d’ateliers d’impression et de reliure moderne. Il publie toute une série de publications en rapport avec l’œuvre d’éducation populaire : livres scientifiques, scolaires, publications standardisées et autres, tous documents propres à intensifier la vie actuelle du pays. Le matériel fourni facilite l’action d’ensemble, coordonne les efforts, généralise les résultats.

4. — Extension de l’édition.

a) Le monde de l’édition étend chaque jour le cycle de ses activités. Il y a maintenant à Madras et Bombay

  1. Travail, de M. Caullery, sur les « Presses Universitaires » et diverses entreprises coopératives d’impression et d’édition existantes hors France (présenté à la Confédération des Sociétés Scientifiques françaises).