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LA LECTURE

les trois modes de perception et d’action motrice : voir (lire des yeux), articuler et écouter (lecture à voix haute), tracer les caractères (écrire).

Deux opérations demeurent étroitement connexes dans l’enseignement au degré supérieur et dans la formation personnelle scientifique aussi bien que dans l’enseignement élémentaire : la lecture et l’écriture. Le résumé de ce qu’on lit, les extraits textuels, l’annotation des faits qu’on juge saillants, dignes d’être retenus, les réflexions personnelles que font faire la lecture, sont indispensables à la bonne assimilation du contenu des ouvrages. C’est le moyen de repasser soi-même par le chemin qu’à parcouru l’auteur.

Mais les notes ainsi prises ont une valeur autre encore que celle d’un simple exercice. Conservées, classées, remaniées, constamment accrues par d’autres notes puisées à d’autres sources, elles peuvent constituer un véritable livre : le livre particulier à chacun et dont chacun puisse dire « Mon Livre », « Mon Encyclopédie », quintescence de tout ce par quoi on a été intéressé, abrégé de tout ce que l’on a appris, mémoire artificielle de tout ce que l’on désire pouvoir se rappeler.

La méthode rationnelle pour lire avec fruit est donc complétée par la méthode rationnelle de prendre des notes. Il convient de les prendre judicieusement, de les rassembler et de les coordonner en des répertoires personnels bien classés. 1° La prise de notes sur fiches ou feuillets mobiles disposés en fichiers ou répertoires, doit avoir la préférence. Les fiches, en effet, constituent en quelque sorte le prolongement de notre cerveau ; elles conservent fidèlement l’enregistrement des données que notre mémoire devient impuissante à retenir à cause de l’accroissement constant des connaissances, elles fournissent les éléments graphiques sur lesquels notre réflexion pourra s’exercer. Les notes que nous prenons complètent constamment cet organe extra cérébral qu’est le fichier. Comme c’est le cas pour un cerveau bien organisé, dont la remémoration est prompte, elles nous fournissent immédiatement le renseignement nécessaire. 2° Les fiches seront classées par matières, soit alphabétiquement comme dans un dictionnaire, soit systématiquement, comme dans la classification décimale.

L’emploi des fiches classées conduit à l’habitude de classer méthodiquement dans l’esprit ce qu’on y retient. L’esprit adopte graduellement, pour ses propres opérations de mémorisation, les mêmes procédés d’enregistrement et de groupement dont il voit et apprécie le fonctionnement matériel dans la classification par fiches. De là ce résultat que la mémoire est rendue plus étendue et la remémoration plus prompte.

Les fiches seront utilisées telles qu’elles dans les travaux (articles, livres composés, cours, conférences, discussions). Elles ont le double avantage ultérieurement : éviter de nouvelles transcriptions souvent sujettes à erreur ; contraindre l’esprit à tenir compte de faits et d’idées annotés à divers moments, affirmés par divers autres esprits et qui expriment autant d’aspects différents d’une même chose. Les notes ainsi nous soustraient à l’unilatéralité. Nous n’entendons plus le son d’une cloche mais les sons d’un carillon.

257.8 Lire à haute voix.

Lire à haute voix fait mieux pénétrer le sens des idées, notre mémoire des mots s’enrichit et notre élocution se perfectionne.

La lecture à haute voix joue un rôle capital. La parole écrite paraît souvent plus pauvre que la parole dite, pour exprimer l’ensemble des états psychiques, car elle ne peut être accompagnée de gestes et d’émotions. La lecture à haute voix, surtout celle du maître, redonne au texte ce qui lui a été enlevé. Il y a lieu de lire à haute voix à l’école, en famille, entre amis et même tout seul.

Les séances de lecture à voix haute en petit groupe sont recommandables. On choisit des extraits d’auteurs qui intéressent la généralité du groupe. On commence par quelques mots sur l’auteur et sa vie ; après lecture on répond aux questions, on relit certains passages, on discute ensemble les difficultés. On peut former des cercles de lecture autour de la bibliothèque (25 personnes dans un cercle au maximum). Ces lectures peuvent s’opérer suivant un plan systématique. On pratique les séances de lecture surtout dans les pays slaves. (Voir aussi les cycles de lectures préparés par la National Home Reading Union).

Au delà de la lecture, il y a l’« apprendre par cœur ». On apprend des poésies, des passages entiers de livre ; les livres saints.

La récitation de textes de mémoire, la lecture de textes ont une grande place dans les procédures, les rituels, les liturgies, dans l’art. Par ex., le serment en justice ; les paroles d’ouverture et de clôture prononcées par le président dans les assemblées ; les préliminaires lus de certains actes notariés ; les offices lus, chantés ou récités.

257.9 Questions diverses.
257.91 Physiologie de la lecture.

1. Mécanisme de la lecture. — La lecture courante des mots, des chiffres, des notes de musique, etc., comporte des mouvements oculaires, des saccades d’amplitude variable. Le plus petit angle que l’œil puisse parcourir latéralement est de 5°. Cet angle est en rapport inverse de la distance des caractères aux yeux ; il est plus petit de loin, plus grand de près. La fatigue oculaire est