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LES MUSÉES

le milieu du IIIe siècle av. J.-C. et qui renfermait, outre la fameuse bibliothèque, des salles de cours, des salles d’élèves et des logements pour les professeurs. Le tout périt dans les flammes.

b) Les collections artistiques ont eu un développement distinct à Athènes : dans une des ailes des Propylées on avait réuni des œuvres de plusieurs peintres célèbres (Pinacothèque). À Rome : les chefs-d’œuvre enlevés à la Grèce furent placés dans des endroits publics. On ornait les monuments publics de peintures ; des riches citoyens réunissaient des curiosités naturelles. À Byzance, Constantin rassembla les œuvres d’art et les répartit dans la ville. Les princes et les riches formaient des collections publiques.

Au moyen âge il n’y eut pas de musées artistiques, mais les églises, les couvents, les abbayes en tinrent lieu. La renaissance opéra des fouilles. Les rois, les villes et les grands eurent des collections plus ou moins précieuses qui devinrent les noyaux de la plupart des grands musées publics. (Médicis, Florence ; Papes, Vatican ; Escorial, Madrid ; François Ier et Louis XIV, Louvre). Les collections des princes furent au début des souvenirs personnels, la collection de portraits de parents et intimes ; le trésor privé, les insignes et les joyaux de la couronne, les meubles, les tapisseries, les verreries, les porcelaines, ce que les souverains ont emporté de leurs voyages, ce que les ambassadeurs étrangers leur ont apporté de cadeaux.

À la fin du XVIIIe siècle intervient l’idée de faire servir les œuvres d’art à former le goût de la population. À partir de la Révolution, on concentra les collections des couvents et les musées sont devenus des institutions publiques. Ils dépendent encore, en certains pays du domaine de la Couronne, mais ils sont inaliénables. Le Louvre a été le premier musée vraiment national qu’il y ait eu en Europe. Pendant les guerres de l’Empire, les Français emportèrent quantités d’œuvres d’art, notamment de Belgique. En 1801 on créa des dépôts dans 15 villes.

Les musées scientifiques ont leur origine dans les cabinets de curiosités naturelles qui naissent avec les sciences naturelles. Les progrès de la navigation, les voyages, les découvertes, les grandes conquêtes coloniales puis, surtout au XVIIIe siècle, l’habitude d’embarquer des naturalistes pour chaque lointaine expédition rassemblent en Europe des collections de presque tout ce qui vit sur le globe, animaux et plantes. Un long et laborieux travail de description et de classification mit de l’ordre dans la multitude des formes et aboutit à une série d’inventaires qui nous servent encore aujourd’hui. Pour les parfaire, certains ont suivi les explorateurs dans les dernières terres inconnues, d’autres ont parcouru les mers. De nombreux amateurs ont recueilli dans une région tous les êtres qui leur plaisaient. Depuis cinquante ans, les navires océanographiques ont révélé un monde nouveau, vivant dans les profondeurs des eaux. Le bilan des êtres vivants s’enrichit ainsi constamment de formes nouvelles. Dès 1619 est publiée une liste de Cabinets scientifiques. En 1681 est installé le Hall d’Anatomie et le Théâtre public de l’Université de Leyde. Vers 1750 est fondé le Musée de Brukman de Wolfenbüttel qui contient des curiosités artificielles. Les chambres des anciens alchimistes, les cabinets de physique, les salons scientifiques du XVIIIe siècle sont des contributions à la formation des musées scientifiques.

255.4 Transformations des musées.

Une transformation similaire à celle des Bibliothèques semble en voie de se produire actuellement dans les musées. Elle prend diverses directions :

1° Les musées étaient autrefois des conservatoires d’objets rares et précieux. Sans leur enlever ce caractère, on cherche à en faire aussi des centres de documentation pour les objets à voir (documents à trois dimensions) ; complètes les objets, soit en les reproduisant, soit en montrant leur liaison et enchaînement, soit en les commentant à l’aide de textes choisis. 2° Les musées, faits d’objets originaux, constituent des collections nécessairement incomplètes. On s’efforce de reproduire les objets eu fac-similés de toute nature ou en modèles réduits et de rendre ainsi possible l’intégration de séries formées par les originaux que possédé une collection. 3° Il n’y avait des musées que pour certains domaines des connaissances et des activités pratiques. Progressivement le Musée devient une forme et une méthode s’appliquant à tous les domaines (science, technique, sociologie, histoire, littérature, médecine, commerce, droit, etc.). 4° Dans une même localité les musées et collections étaient séparés, disséminés, laissés là où les circonstances les avaient fait naître. L’idée de musée général, collectif, universel, se fait jour. Les divers musées ne sont plus considérés que comme des départements ou des branches d’un musée central, à la manière dont les collections de la bibliothèque sont considérés comme des fonds et les établissements destinés comme des succursales. 5° Le musée était autonome et isolé parmi toutes les institutions de l’ordre intellectuel. Il tend à prendre une place coordonnée dans l’ensemble de ces institutions envisagées selon le principe supérieur d’une organisation générale du Travail Intellectuel : Rapports du Musée avec le livre (Bibliothèque), avec l’Enseignement (École et Université), avec la Recherche (Instituts) avec les applications sociales (La vie en général). 6° Le Musée dans son organisation demeurait soit local, soit régional ou national. On considère de plus en plus maintenant l’ensemble des musées d’une localité, d’une région, d’un pays et, maintenant, l’ensemble des musées du monde. Et cela non seulement pour l’interéchange des collections, mais pour la coopération à des travaux d’élaboration en commun.