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ÉLÉMENTS GRAPHIQUES


tions méditerranéennes. Les Phéniciens n’auraient rien inventé du tout. L’écriture des Français serait née sur leur sol. Glozel aurait représenté une grande civilisation européenne qui aurait su s’étendre sur un vaste territoire. Les objets de Glozel, disaient les inventeurs, appartenaient au néolithique le plus ancien ; ils comporteraient des galets avec incision d’animaux et de signes d’écriture, signes qui ont été dès le début de l’histoire des plaques d’argile gravées de signes — au nombre de 120 — analogues aux signes chinois et phéniciens.

Le Clément de St Marcq (Histoire générale des Religions) explique le mécanisme de l’histoire des cinq derniers millénaires par la lutte entre l’alphabet et l’écriture chinoise. Pour lui, l’Au delà a préparé et appuyé la Révolution alphabétique ou chrétienne.

222.13 Espèces d’écriture.

1. Il y a lieu d’envisager : 1o les diverses espèces d’écriture sur la base de l’alphabet latin ; 2o les diverses écritures sur la base d’autres alphabets.

2. À mesure qu’on a écrit davantage s’est affirmé la nécessité des écritures cursives, celles où les caractères d’un même mot sont tracés liés les uns aux autres et sans levée de la main.

Des progrès immenses ont été réalisés avec l’écriture cursive. Écrire plus vite, plus vite. La vitesse a engendré la cursive. Puis le papier lisse, la plume, le stylo, la dactylo ont poussé plus loin la vitesse.

L’écriture anglaise — écriture coulée — et toute la calligraphie ont été ruinées par le stylo : la machine à écrire en détruit la raison d’être.

3. Le plus petit changement de détail transforme entièrement une lettre et ce n’est pas par des courbes bizarres ni par des jambages cassés qu’on peut espérer créer de nouveaux types. Il y a trois genres propres dans la lettre : ce sont le romain, l’italique et le gothique. Il ne faut pas songer à dénaturer le romain. Ces lettres sont dans l’œil des peuples depuis 2000 ans et plus et leur lisibilité dépend de leur pureté de forme.

Le dédoublement de certaines lettres latines est arbitraire. Seinder, par exemple, l’I latin en un « i » et un « ji » ; l’V latin en un « u » et un « vé », c’est modifier l’alphabet d’une langue morte. Cela affecte la récitation de l’alphabet, l’épellation et le classement alphabétique.

4. Lettres. — Nos minuscules, en général, sont imitées de l’écriture caroline. Nos majuscules copient en principe la capitale du temps d’Auguste.

La capitale est toujours imposante. Elle a sa place dans les titres. Il faut envisager la facilité de lecture et la beauté d’un imprimé.

Le choix des signes et des caractères est influencé par leur existence ou non dans les imprimeries et sur les machines à écrire. En Allemagne, le choix des caractères joue un rôle important, antiqua (alphabet latin), Fraktur (gothique). Une complication spéciale y surgit du fait que le Yiddish, qui se rapproche de l’allemand, est composé et imprimé en caractère hébraïque.

222.14 L’alphabet.

Il y a lieu de considérer : 1o les lettres, 2o les accents, 3o la ponctuation, 4o les signatures et les sigles.

1. Les lettres. Ce sont, dans l’alphabet français :
a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z

Ces lettres ont leurs capitales correspondantes :
A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z

2. Les accents. — Ce sont des signes qui se mettent sur une voyelle pour en faire connaître la prononciation ou pour distinguer un mot d’un autre. En français il y a trois accents : l’aigu, le grave, le circonflexe.

Certaines langues (par ex. le Tchèque et le Polonais) ont leurs lettres largement accompagnées d’accents diacritiques.

3. La ponctuation. — Elle est faite de signes tels que
. , ; : ’ - ? !

La ponctuation n’existe pas dans les textes anciens. À l’origine il n’y avait ni ponctuation ni séparation des mots. Introduite tard dans l’écriture, la ponctuation sert à marquer les divisions des phrases, la numérotation 1o, 2o, 3o, etc., ou la littéralisation A, B, C, a, b, c, etc. est une sorte de ponctuation des idées elles-mêmes qui se prolonge ensuite dans les autres domaines du livre-document : paragraphes, chapitres, etc.

Le ton, dit le proverbe, fait la chanson. On pourrait ajouter « comme l’habit fait le moine ». La seule écriture ne suffit pas. Le point d’interrogation fait changer le ton. Des langues écrites connaissent le point d’ironie. Les Iroquois terminaient chaque discours par hiso (j’ai dit) suivi de l’exclamation koué à laquelle l’orateur donnait l’intonation voulue, douleur ou enthousiasme guerrier.

Pourquoi ayant imaginé le point d’interrogation, ne pourrait-on développer le système, le généraliser, introduire dans le texte des signes qui accentueraient le sens des phrases par ex. +, ×, etc.

222.15 La connaissance des écritures.

La connaissance des écritures a donné lieu : 1o à la Paléographie ; 2o à la Graphologie sur les données de laquelle sont basées les études sur les faux en écriture.

222.151 PALÉOGRAPHIE.

1. La paléographie est la connaissance des écritures anciennes et de tout ce qui s’y rapporte. Se dit particulièrement de l’art de les déchiffrer.

2. Le domaine de la paléographie a été déterminé par l’histoire, a) La paléographie ne comprend que la lecture des manuscrits, des chartes, des diplômes, accessoirement