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les métamorphoses

de doux aliments. » Le Barbare, jaloux d’usurper l’honneur d’un si grand bienfait, offre à Triptolème l’hospitalité ; et, tandis que le sommeil appesantit ses yeux, il l’attaque, le fer à la main. Il allait lui percer le sein ; mais Cérès le change en lynx, et commande au jeune Athénien de lancer de nouveau dans les airs ses coursiers sacrés. »

La plus âgée de nos sœurs avait fini ses doctes chants ; les nymphes, d’une voix unanime, décernent la palme aux divinités qui résident sur l’Hélicon. Nos rivales vaincues ont recours à l’injure : « C’est trop peu pour vous, leur dit la Muse, d’avoir mérité votre châtiment par un téméraire défi ; à cette faute, vous ajoutez l’insulte. La patience n’est plus en notre pouvoir ; nous saurons vous punir et suivre les mouvements de notre colère. » Les filles de l’Émathie accueillent ces menaces par le rire du mépris ; elles veulent parler, et joindre à la violence de leurs clameurs des gestes insolents. Tout à coup elles voient des plumes se faire jour à travers leurs ongles, et leurs bras se couvrir de duvet : se regardant l’une l’autre, elles voient leur bouche se durcir en un bec allongé ; oiseaux d’une espèce nouvelle, elles vont peupler les forêts. Elles veulent meurtrir leur sein, mais leurs bras agités les soulèvent et les tiennent suspendues dans les airs ; elles sont métamorphosées en pies, hôtesses injurieuses des forêts : sous leur nouveau plumage, elles ont conservé leur ancien caquet, leur voix rauque et babillarde, et leur désir insatiable de parler.


(1) Syène était une ville considérable d’Égypte, voisine de l’Éthiopie, près du tropique du Cancer ; c’est aujourd’hui Assouan.

(2) Le ceste était un gantelet ou brassard en cuir de bœuf, garni de plomb, de fer ou d’airain, dont s’armaient ceux qui disputaient le prix du pugilat. Ils s’en couvraient les mains et les bras jusqu’au coude, à l’aide de courroies.

(3) Le Cinyphius est une rivière d’Afrique appelée aujourd’hui Macros, dans le royaume de Tripoli.

(4) La Marmarique était une grande contrée de l’Afrique, entre l’Égypte et les Syrtes, bornée au nord par la Méditerranée, à l’est par l’Égypte, à l’ouest par la Cyrénaïque.

(5) Les Nasamons étaient d’anciens peuples de l’Afrique, qui occupaient une partie du Sahara, ou désert de Barbarie.

(6) La Bactriane était une province de Perse entre la Margiane, la Scythie, l’Inde et le pays des Messagètes. Son nom moderne est Khoraçan. et celui de la ville capitale Termend.

(7) Mendès était la métropole de la Mendésie, contrée de l’Égypte.

(8) Acrisius avait renfermé dans un coffre Danaé et Persée, et les avait fait exposer sur la mer.

(9) Polydecte était roi de Sériphe, l’une des Sporades dans la mer Égée. Il fit élever Persée et Danaé qu’il avait recueillis. Lorsque Persée fut devenu grand, il l’éloigna de son île, et osa déclarer ses feux à Danaé, qui, par le secours de Dictys, frère de Polydecte, se sauva dans le temple de Minerve. À son retour, Persée changea en rocher Polydecte, et plaça Dictys sur le trône.

(10) Cythne et Gyare étaient deux des Cyclades dans la mer Égée. Ce sont aujourd’hui Termie et Joura.

(11) La Péonie était une province de la Macédoine, entre la Mygdonie et l’Émathie.

(12) Thespie, ville de Béotie, était située au pied de l’Hélicon, et suivant Pline, au pied du Parnasse.

(13) Aganippe était fille du fleuve Permesse ; elle fut métamorphosée en une fontaine, dont les eaux avaient la vertu d’inspirer les poètes.

(14) Eusèbe voit dans cette métamorphose des dieux l’origine de leur culte chez les Égyptiens.

(15) On donnait à Cérès le nom de Θεσμοφόρος, fondatrice des lois, parce que l’agriculture, dont elle était la mère, avait jeté le fondement des lois, en fixant les propriétés.

(16) Enna, ville de Sicile, était située vers le milieu de cette île, ce qui la fit surnommer Siciliæ umbilicus : c’est aujourd’hui Castro Giovanni. Cérès y avait un temple. Cicéron et Tite-Live placent, comme Ovide, auprès d’Enna, le théâtre de l’enlèvement de Proserpine. Claudien et Hygin le placent sur le mont Etna, Homère dans les champs de Nyda.

(17) Les Palices, deux frères jumeaux, fils de Jupiter et de la nymphe Thalie, donnèrent leur nom à la ville de Palice et au lac voisin, dont l’eau était toujours bouillante et sulfureuse.

(18) Les Bacchiades étaient une famille corinthienne qui tirait son origine de Bacchis, roi de Corinthe, ou de Bacchia, fille de Bacchus. Bannis de Corinthe où ils régnaient, ils allèrent fonder en Sicile la ville de Syracuse.

(19) Les poëtes ont feint que le fleuve Anapis avait aimé Cyane parce qu’il mêle ses ondes avec les siennes, et qu’elles coulent ensemble vers la mer.

(20) Cette fable a été adoptée par des auteurs graves, tels que Pline, Pomponius Méla, Ammien Marcellin.

(21) Ægid. Forcellin (Lex. t. III, p. 456) explique ainsi le sens de ce passage : « Hoc est mel, vel mulsum, quo tostam polentam consperserat coxeratque. Videtur Ovidius describere Cyceonem. »

(22) Les anciens croyaient que l’Alphée, après avoir baigné l’Élide, traversait la mer, dont les eaux ne se mêlaient pas avec les siennes, et qu’il allait se confondre avec la fontaine Aréthuse, près de Syracuse, dans l’île d’Ortygie.

(23) Peut-être cette fable n’a-t-elle d’autre origine que le nom grec Ασκάλαφος, qui désigne une espèce de chouette.

(24) Cette fiction est née sans doute de ce que la Lune, c’est-à-dire Diane ou Proserpine, distribue sa lumière, pendant six mois, à chacun des deux hémisphères.

(25) Stymphale, ville, fleuve, lac, fontaine et forêt d’Arcadie, qui reçurent leur nom de Stymphale, fils d’Élatus et de Laodicée, et roi d’Arcadie. Une ancienne tradition plaçait sur les bords de ce fleuve des oiseaux monstrueux, appelés Stymphalides, qui furent détruits, dit-on, par Hercule, mais que Pline regarde comme fabuleux.

(26) Peut-être faut-il voir dans ces deux serpents l’image allégorique des sages conseils, par lesquels Cérès prémunit Triptolème contre tous les dangers.

(27) Le nom de Triptolème signifie : qui rompt les sillons. Cette fable paraît n’avoir d’autre fondement que l’introduction du culte de Cérès dans l’Attique, par Triptolème, roi d’Éleusis, qui se fit initier aux mystères de la déesse. Le char tiré par des dragons ailés est le vaisseau sur lequel ce prince parcourut les mers de la Grèce, pour porter des blés en diverses contrées, et enseigner l’art de les semer.