Page:Ovide - Œuvres complètes, trad Nisard, 1838.djvu/587

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contre les nôtres une attaque perfide. [2, 215] Il y avait une plaine immense, fermée par des collines, et par une forêt, asile des bêtes fauves; quelques hommes seulement y sont demeurés, et çà et là des troupeaux épars. Le reste de l'armée s'est caché dans de jeunes taillis. Comme un torrent grossi par la pluie du ciel, [2, 220] ou par la fonte des neiges qui ont cédé aux tièdes haleines du zéphyr, se précipite à travers les chemins et les campagnes ensemencées, et ne permet plus à ses rives de borner comme auparavant ses ondes contenues, ainsi les Fabius sillonnent la vallée en tous sens, et renversent tout sur leur passage. Tout soupçon, toute crainte est loin de leur esprit! [2, 225] Où courez-vous, famille généreuse? ne vous mettez pas ainsi à la merci de l'ennemi; gardez que votre loyauté imprudente ne vous fasse tomber dans les pièges de la guerre: la ruse triomphe de la valeur. Les Véiens sortent de tous côtés, inondent la plaine, et en ferment les issues.

Que fera cette poignée de braves contre le nombre qui l'accable? [2, 230] Quel parti prendre dans ce moment désespéré? Tel qu'on voit le sanglier, relancé loin des forêts de Laurentum, se retourner plus prompt que la foudre, renverser les chiens de sa hure terrible, et finir par succomber lui-même, ainsi les Fabius sont déjà vengés avant de périr; ils rendent blessure pour blessure. [2, 235] Un seul jour les avait vus voler au combat, un seul jour les y vit recevoir la mort. Cependant il semble que les dieux eux-mêmes aient pourvu à ce que la race d'Hercule ne s'éteignît pas sans retour. Un jeune enfant était resté à Rome, trop faible pour porter les armes; [2, 240] c'était l'unique rejeton de cette noble famille, et c'est de lui que tu devais un jour descendre, ô Maximus, pour sauver l'état par tes sages lenteurs.

Trois constellations se touchent au ciel, le Corbeau, le Serpent et la Coupe qui les sépare; [2, 245] cachées pendant les ldes, elles ne se lèvent qu'à la nuit suivante; mais pourquoi si près l'une de l'autre? je vais le raconter en peu de mots.

Phébus allait offrir une fête solennelle à Jupiter; "Toi qui m'appartiens, dit-il au corbeau, [2, 250] va puiser une eau vive dans les sources limpides, et qu'aucun retard ne soit apporté à notre pieux sacrifice." Le corbeau suspend une coupe d'or à ses serres crochues, et prend son essor à travers les airs. Un figuier se présente à lui, couvert de fruits abondants, mais fermes encore; il veut y goûter; la figue résiste: son heure n'était pas venue. [2, 255] Le corbeau oublie les ordres qu'il a reçus, et, perché sur une branche, il attend que les fruits s'amollissent, mûris par le temps. Il se rassasie alors, puis, saisissant un long serpent de ses ongles noirs, il revole vers son maître et lui parle ainsi: "Si j'ai tant tardé, c'est que ce serpent, gardien des sources vives, m'en a disputé l'accès, [2, 260] et m'a empêché d'exécuter sur le champ ton message." "