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OVIDE

Corinne a bien connu mon faible, et la coquette
Excelle à me piquer au vif ;
Que de fois elle a feint un malaise excessif
Et pressé ma lente retraite !
Ah ! que de fois coupable, en m’imputant des torts,
Son front a joué l’innocence !
Après ces aiguillons à ma concupiscence,
Souple, elle accueillait mes transports.
Dieux bons ! quels doux propos alors, que de caresses
Que de baisers et quels baisers !
Vous, ma reine en ce jour, mentez de même, osez
Refréner parfois mes tendresses.
La nuit, à votre seuil, laissez-moi tristement
De l’hiver sentir la froidure.
Mon amour, à ce prix, se fortifie et dure ;
C’est sa joie et son aliment.
Banale liaison me devient presque amère :
Tel nous aigrit un mets trop doux.
Si jamais Danaé n’eût geint sous les verrous,
Jamais Zeus ne la rendait mère.
Junon, en s’occupent de la génisse Io,
La fit paraître plus superbe.
Qui veut travail aisé doit aux champs cueillir l’herbe,
Ou boire en un fleuve à pleine eau.
Belle, entends-tu durer ? tout galant, qu’on l’attrape.
Las ! je m’enferre en mes discours !
N’importe, complaisance est nuisible toujours :
Je fuis qui vient, suis qui m’échappe.