Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/181

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liberté, point de culpabilité dans leur première chute. Si de nouvelles fautes les précipitent plus bas, il le faut ainsi pour peupler les régions inférieures de l’univers, pour remplir jusqu’aux derniers degrés l’échelle des émanations. Ainsi le mal devient nécessaire, ou plutôt le mal n’est plus, mais seulement le moins bien, mais une succession d’êtres de plus en plus éloignés de la perfection divine d’où ils viennent, où ils retournent. Car tous y retournent tôt ou tard, et c’est la fin commune du juste et du coupable de s’abîmer dans l’unité, de perdre la conscience de ce qu’ils furent. Ainsi Plotin revient aux fables par la métempsycose, et, moraliste sévère, il désarme toute la morale en supprimant la permanence du moi, sans laquelle la vie future n’a plus pour nous ni espérances ni terreurs. Ainsi, l’âme n’étant qu’une émanation de la substance divine, cette doctrine conclut à diviniser l’homme, qui est le pire des faux dieux. Tout le paganisme respire dans l’orgueilleuse satisfaction que Plotin goûtait en mourant, lorsque, interrogé par un de ses disciples : Je travaille, disait-il, à dégager en moi le divin[1].

En considérant de près les différents dogmes de Plotin, son unité irrévélée, sa trinité imparfaite, les émanations dont il compose la substance de l’univers, la descente des âmes et leur retour, on y aperçoit les mystères d’une théologie antique répandue en Orient. Les Étrusques l’avaient communiquée aux anciens Ro-

  1. Porphyre, de Vita Plotini, 2