Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/211

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Il raconte avec sa brièveté pour ainsi dire funéraire comment, après les dévastations des provinces espagnoles par les barbares, après que la famine et la peste furent venues compléter l’ouvrage de l’épée, comment les bêtes féroces, sorties de leurs solitudes, pénétraient dans les villes, et, enhardies par les morts qu’elles avaient dévorés, s’attachaient aux hommes vivants et venaient leur livrer les derniers et les plus terribles combats. Ces chroniques ne manquent donc-pas d’intérêt dans leur précision même cependant ce qui domine en elles, c’est la brièveté et la sécheresse. Elles enregistrent les événements pour eux-mêmes, sans préoccupation des larmes qu’ils peuvent tirer des yeux des hommes elles conservent pour ainsi dire un caractère monumental on écrit sur le papyrus, qui va devenir si rare, comme on écrivait sur le marbre et sur l’airain.

On était arrivé à une époque où l’histoire telle que les anciens l’avaient conçue était impossible. Il n’y avait pas de main assez courageuse pour reprendre la plume de Tacite ou de Tite-Live ; la plume, de Prosper d’Aquitaine ou d’Idace devait paraître plus légère, et il n’y aura pas de monastère si dénué d’hommes intelligents qui ne trouve au moins un moine pour écrire, année par année, la mort des hommes illustres contemporains, les événements qui ont porté la joie ou le deuil dans la contrée. Ce sera en peu de mots, en entremêlant