Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/70

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Nous avons, en troisième lieu, à parler de la pauvreté. Dans l’antiquité, les pauvres avaient été foulés aux pieds, le génie ancien les regardait comme des hommes frappés de la réprobation de Dieu. Encore au temps de saint Ambroise, les païens et les mauvais chrétiens avaient coutume de. dire : Nous ne nous soucions pas de donner à des gens que Dieu a maudits puisqu’il les laisse dans la peine et l’indigence. Il fallait commencer par honorer la pauvreté, c’est ce qu’on faisait en lui donnant la première place à l’église et dans la communauté chrétienne. Saint Jean Chrysostome le dit quelque part « Comme les fontaines disposées près des lieux de prières pour l’ablution des mains que l’on va tendre vers le ciel, les pauvres ont été placés par nos aïeux près de la porte des églises pour purifier nos mains par la bienfaisance, avant de les élever à Dieu »[1]. Ainsi les pauvres étaient, plus que respectés, ils étaient nécessaires, et de là cette grande parole souvent incomprise, souvent blasphémée : « Il y aura toujours des pauvres. » Il n’a pas été dit qu’il y aura toujours des riches, mais il fallait qu’il y eût toujours des pauvres, et, à défaut de la pauvreté forcée, la pauvreté volontaire, qu’il y eût ces institutions dans lesquelles chacun veut faire abnégation de sa propriété personnelle et vœu de pau -

  1. S. Joann. Chrysost. Verbis apost. habentes eumdem spiritum, serm. III, c. 2.