Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/125

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et, le zèle amer des hommes du Nord. Ce temps était de ceux où la pensée, cessant d’être maîtresse de la parole, se laisse trahir par l’excès comme par l’insuffisance de l’expression où l’écrivain dit moins qu’il ne veut, plus qu’il ne veut, rarement ce qu’il veut. Saint Colomban reproche à Boniface IV ce je ne sais quoi d’orgueilleux qui le pousse à réclamer plus d’autorité que les autres dans les choses divines. Il faut bien croire qu’il le blâme seulement de s’élever au-dessus des papes ses prédécesseurs, et qu’en attaquant la personne, il respecte le siège, puisqu’il ajoute aussitôt « Nous tous, Hibernois, qui habitons les extrémités du monde, nous sommes les disciples de saint Pierre, de saint Paul, des apôtres, qui ont écrit sous la dictée de l’Esprit-Saint; nous ne recevons rien de plus que la doctrine apostolique, telle que Rome nous l’a transmise. Nous sommes liés à la chaire de saint Pierre ; et, quoique Rome soit grande et célèbre, c’est à cause de cette chaire seulement qu’elle nous paraît célèbre et grande. Depuis que l’Esprit de Dieu, entraîné vers l’Océan par ces deux nobles coursiers dont Rome est si heureuse de posséder les reliques, par les apôtres Pierre et Paul, a passé le détroit, leurs successeurs sont à leurs yeux grands et illustres, et ils deviennent presque célestes pour nous. » De telles paroles sont décisives ; mais l’esprit de Colomban éclate moins encore dans ses pa-