Plusieurs n’ont vu dans le sacre des rois chrétiens qu’une usurpation religieuse, ou qu’un retour servile aux institutions judaïques. J’y aperçois l’effort du christianisme pour mettre la main sur la royauté barbare, sur ce pouvoir charnel, en quelque sorte, qui se transmettait par le sang, dont le privilége, selon l’Edda, était de brandir une hache plus pesante, et de posséder la force de huit hommes. J’aperçois la pensée d’en faire un pouvoir tout nouveau, un pouvoir spirituel, en ce sens qu’il tirera toute sa vigueur, non de la chair, mais de l’esprit ; non de la victoire, mais de la paix qu’il s’engage à maintenir ; non-seulement de la justice, mais de la miséricorde qui devient le plus glorieux de ses attributs. Voilà pourquoi le christianisme traite l’autorité souveraine comme une sorte de sacerdoce, pourquoi il ne craint pas de profaner sur le front de ces chefs de guerre l’onction pacifique du prêtre et de leur conférer un caractère qui ne leur assure le respect d’autrui qu’en leur enseignant premièrement le respect d’eux-mêmes. Les évêques qui présidaient à ces rites sacrés n’en laissaient pas évanouir la pensée avec le bruit des orgues et la fumée de l’encens. Jonas d’Orléans écrit un opuscule de l'Éducation du Prince; Hincmar adresse à Charles le Chauve un traité de la Personne royale et du Métier de roi, où l’on trouve avec surprise, quand on n’attendait que des conseils de piété, neuf chapitres sur la guerre et