çoit pas cette unité mystérieuse qui est en lui, cette’ sollicitude providentielle des ancêtres pour la postérité, ce souvenir respectueux et reconnaissant de la postérité pour les ancêtres, ces monuments, ces livres, ces traditions, par lesquels ceux qui ne seront plus ambitionnent d’instruire ceux qui seront un jour. Jamais la prévoyance des animaux les plus intelligents s’étendit-elle au delà de leurs petits ? Mais, si tout ne finit pas avec la vie, si chaque génération ne laisse ici-bas ses dépouilles mortelles que pour entrer dans une autre existence, si à ce rendez-vous solennel les premières arrivées doivent attendre les plus tardives, et les plus jeunes rejoindre les plus anciennes alors, entre ces êtres innombrables, destinés à former ensemble une société définitive, on conçoit qu’il existe des liens, on conçoit que ceux qui, les premiers, ont habité cette terre de passage, songeant à ceux qui devaient venir après, aient laissé, pour eux des tentes dressées et des sillons ensemencés ; on comprend la généalogie des siècles et l’unité du genre humain.
Il y a donc deux mondes : l’un invisible, qui se découvre à la pensée comme infini et éternel, vers lequel toutes les générations des hommes marchent en vertu d’une vocation commune, devant l’immensité duquel elles sont égales, comme elles sont du même âge devant son éternité ; l’autre visible, fini, soumis aux lois du nombre, du temps