Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/204

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propriété. Le droit romain n’a pas d’autre grandeur, la lutte du peuple contre le sénat n’a pas d’autre intérêt, tout le travail des jurisconsultes n’a pas d’autre pensée que d’arracher peu à peu le citoyen à la tyrannie d’un patriciat sacerdotal, de rétablir les droits de la nature dans la société domestique, de fortifier le domaine privé, de le protéger dans toutes les vicissitudes des contrats et des successions, et de conduire ainsi la propriété à ce degré de perfection où les législations modernes l’ont maintenue. Mais les anciens et les Romains eux-mêmes ne réussirent pas complètement à renouveler l’ordre social. Ils échouèrent devant deux obstacles : d’un côté la confusion du spirituel et du temporel qu’ils conservèrent en principe en ne reconnaissant point de droit contre l’État, point de liberté pour les consciences : de l’autre côté l’esclavage qui viciait la propriété en lui donnant une étendue sacrilège, et qui déshonorait le travail en le réservant à des mains serviles.


Le Christianisme seul eut la hardiesse de rompre sur ces deux points avec toute la tradition des sociétés païennes, et d’établir deux dogmes dont la nouveauté fit le scandale des philosophes et l’indignation des jurisconsultes ; nous voulons dire la séparation du spirituel et du temporel et la fraternité des hommes. D’une part, le Christianisme, en arrachant à l’État le domaine des consciences, relevait