Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/205

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la liberté humaine : il lui assurait dans ce monde l’asile du for intérieur, dans l’autre, l’asile de l’immortalité, et, pour établir une maxime si tutélaire, il n’épargna pas le sang de ses martyrs. D’un autre côté, les chrétiens ne professaient pas cet individualisme étroit dont on les a trop souvent accusés, ils ne se renfermaient point, comme on l’a dit, dans l’égoïsme du salut. Leur théologie n’avait pas d’expression trop forte pour exprimer l’unité, la solidarité, la responsabilité mutuelle de la famille humaine. C’était beaucoup d’enseigner l’origine commune des hommes et leur égalité devant Dieu. Mais l’union dans le Christ faisait plus que l’union dans Adam : les chrétiens devenaient plus que des frères, ils devenaient les membres d’un même corps. Et, pendant que Platon remerciait les dieux de l’avoir créé homme plutôt que femme, libre plutôt qu’esclave, Grec plutôt que barbare, saint Paul déclarait qu’il n’y avait plus « ni homme ni femme, ni libre ni esclave, ni Grec ni barbare, mais un seul corps en Jésus-Christ. »

La fraternité chrétienne n’eut jamais d’image plus parfaite que cette église primitive de Jérusalem, ou toute la multitude de ceux qui croyaient n’avaient qu’un cœur et qu’une âme, et où l’on ne voyait point de pauvres, parce que tous ceux qui possédaient des terres ou des maisons les vendaient et en apportaient le prix. « Ils le mettaient aux pieds des apôtres, et on le distribuait à chacun