Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/449

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leur accorder une foi entière avant d’en avoir mesuré la grandeur et pesé l’importance. Souvent la fraude se fait précéder d’un fantôme de loyauté, et se prépare c la confiance d’autrui par sa fidélité dans les petites choses, afin de mieux tromper dans les grandes. 4° et 5° La clef qui ouvre infailliblement les plus secrètes entrées des cœurs, c’est l’examen attentif des caractères que donne la nature, et des fins vers lesquelles tendent les désirs des hommes. L’observateur doit se garder d’un excès de finesse, qui lui ferait supposer dans le commun des hommes une habileté qu’ils n’ont pas. Il en est d’autres qu’il faut scruter jusque dans les plus profonds replis de l’âme. On dit que Tigellinus, voyant qu’il ne pouvait égaler les ministres des plaisirs de Néron, descendit dans les arrière-pensées du tyran, et partagea sa puissance en se faisant le ministre de ses craintes. 6° Il faut savoir user avec discernement des observations et des rapports d’autrui. Les ennemis d’une personne vous apprendront ses défauts et ses vices ; ses amis vous diront ses vertus et ses qualités ; vous saurez par ses serviteurs son humeur et ses habitudes ; ceux qui l’approchent de plus près et qui l’entretiennent vous feront part de ses opinions. La rumeur publique mérite peu de foi, et les jugements des supérieurs sont suspects, parce que rarement il leur est donné de voir à découvert dans un esprit de ceux qui leur obéissent et qui les craignent.