Page:Pétrone, Apulée, Aulu-Gelle - Œuvres complètes, Nisard.djvu/164

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appelle sensibles, non sans raison, puisque leur âme est soumise aux mêmes agitations que la nôtre.

Chapitre 14

C'est pourquoi nous devons ajouter foi aux diverses cérémonies des religions, et aux différentes supplications usitées dans les sacrifices. Quelques-uns de ces démons aiment les cérémonies qu'on célèbre la nuit, et d'autres, celles qu'on célèbre le jour ; ceux-ci veulent un culte public, et ceux-là un culte particulier ; les uns demandent que la joie, les autres que la tristesse préside aux sacrifices et aux solennités qu'on leur consacre : ainsi les dieux de l'Égypte sont presque toujours honorés par des gémissements ; ceux de la Grèce, par des danses ; ceux des barbares, par le bruit des cymbales, des tambours et des flûtes. On observe la même différence, selon les coutumes de chaque pays, dans la marche des cérémonies, dans le silence des mystères, dans les fonctions des prêtres, dans les rites des sacrificateurs, et même dans les statues des dieux, dans les dépouilles qui leur sont offertes, dans la consécration des temples et dans le lieu où ils sont bâtis, dans la couleur et le sacrifice des victimes. Tous ces usages sont établis solennellement, selon les divers pays ; et souvent nous reconnaissons dans les songes, dans les présages et les oracles, que les dieux sont indignés, si par ignorance ou par orgueil on a négligé quelque détail de leur culte. Je pourrais citer une foule d'exemples de ce genre ; mais ils sont tellement connus et en si grand nombre, que celui qui voudrait les énumérer en oublierait beaucoup plus qu'il n'en citerait. Je n'entreprendrai donc point de rappeler ces faits, auxquels certains esprits peuvent ne point ajouter foi, mais qui sont du moins universellement connus. Il vaut mieux discourir des différentes espèces de génies cités par les philosophes, afin que vous puissiez clairement connaître quel était le pressentiment de Socrate, et quel était le dieu qu'il avait pour ami.

Chapitre 15

Car, dans une certaine signification, l'âme humaine, même enfermée dans le corps, est appelé démon : "Cette ardeur nous vient-elle, Euryale, des dieux ? Ou divinisons-nous nos désirs furieux" ? Ainsi un bon désir de l'âme, c'est un dieu bienfaisant. De là vient que plusieurs, comme il a été dit, appellent g-eudaimohn (heureux) celui dont le démon est bon, c'est-à-dire, dont l'âme est formée par la vertu. Dans notre langue, on peut nommer ce démon, génie ; je ne sais si l'expression est parfaitement juste, mais je hasarde ce terme, parce que le dieu qu'il représente est l'âme de chaque homme : dieu immortel, et qui cependant naît ("gignitur"), en quelque sorte avec l'homme ; aussi les prières, dans lesquelles nous invoquons le "génie" et "Génita", me semblent expliquer la formation et le nœud de notre être, lorsqu'elles désignent, sous deux noms, l'âme et le corps, dont l'assemblage constitue l'homme. Dans un autre sens, on appelle encore démon l'âme humaine qui, après avoir payé son tribut à la vie, se dégage du corps ; je trouve que, dans l'ancienne langue des Latins, on la nommait "Lémure". Parmi ces Lémures il en est qui, divinités paisibles et bienfaisantes de la famille, sont chargés du soin de leur postérité ; ils portent le nom de Lares domestiques. D'autres au contraire, privés d'un séjour heureux,