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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/140

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— Dites-moi, je vous prie, mon maître, quelle différence vous trouvez entre Cicéron et Publius[2] ? Le premier, selon moi, est plus éloquent ; mais l’autre est plus moral. Que peut-on, par exemple, dire de mieux que ces vers ?

Le luxe a vaincu Rome, et, sous d’indignes lois,
La mollesse asservit la maîtresse des rois.
Jadis, sous l’humble chaume, en des vases d’argile,
La faim assaisonnait un mets simple et facile.
Sous des lambris dorés, et dans un seul repas,
L’un dévore aujourd’hui les fruits de vingt climats.
Pour lui Chio[3] mûrit sa liqueur purpurine ;
La poule numidique enrichit sa cuisine ;
L’oiseau cher à Junon, si fier de son éclat,
S’engraisse pour flatter son palais délicat ;
Que dis-je ? la cigogne, aimable voyageuse,
Vient orner à son tour sa table somptueuse.
L’autre voit sans courroux, chez vingt adorateurs,
Sa femme promener ses lubriques ardeurs.
Le digne époux ! aussi, voyez comme elle brille !
La perle orne son front, l’émeraude y scintille ;
Un voile transparent, de ses secrets appas,
Dessine les contours, et ne les cache pas.
Mais ces tissus, Phryné, gênent encore la vue[4] :
Ose enfin au public te montrer toute nue !