Aller au contenu

Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tous les fragments épars des différents écrits de Pétrone, tels que l’Albutia, l’Eustion et la diatribe en question, pour en former un corps d’ouvrage : dès lors, le défaut de plan et de suite dans ce roman serait facile à expliquer.

Non, ce n’est pas l’empereur Néron que Pétrone a représenté sous le personnage de Trimalchion, mais bien plutôt Tigellin, l’infâme Tigellin, cet homme sorti de la lie du peuple, qui, par la corruption de ses mœurs et ses lâches adulations, prit en peu de temps un grand ascendant sur l’esprit de l’empereur, et fut le principal auteur de la disgrâce de Pétrone. Celui-ci s’en vengea sans doute en homme d’esprit, et peignit cet ignoble favori du prince sous les traits d’un amphitryon fastueux et ridicule ; peut-être aussi le festin de Trimalchion est-il la parodie de cette fameuse orgie que Néron donna sur l’étang d’Agrippa, par les soins et sous la direction de Tigellin[1].

Dans tous les cas, il n’est pas douteux, selon moi, que le Satyricon ne soit, du moins en grande partie, l’ouvrage de ce même Pétrone dont parle Tacite[2], et qui fut, à la cour de Néron, l’arbitre du goût, arbiter elegantiarum, ce qui lui fit donner le surnom d’Arbiter, non pas comme une simple épithète, mais comme un

  1. TACITE, Annales, liv. XV, ch. 37.
  2. Ibid., liv. XVI, ch. 14 et 18.