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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/152

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que du sang. Mais, en entrant au logis, je trouvai mon soldat étendu sur un lit : il saignait comme un bœuf, et un médecin était occupé à lui panser le cou. Je reconnus alors que c’était un loup-garou[1] ; et, à dater de ce jour, on m’aurait assommé plutôt que de me faire manger un morceau de pain avec lui. Libre à ceux qui ne veulent pas me croire d’en penser ce qu’ils voudront ; mais, si je mens, que les génies qui veillent sur vous m’accablent de leur colère !


CHAPITRE LXIII.

Ce récit nous laissa tous saisis d’étonnement : — Je vous crois, dit Trimalchion, et votre histoire m’a tellement frappé, que les cheveux m’en ont dressé sur la tête. Je connais Nicéros, mes amis ; il ne s’amuserait point à nous débiter des sornettes ; ce n’est point un hâbleur, et il mérite toute votre confiance. Je vais moi-même vous raconter quelque chose d’horrible et d’aussi extraordinaire que de voir un âne marcher sur un toit[1]. Je portais encore une longue chevelure (car, dès mon enfance, j’ai toujours mené une vie voluptueuse[2]), quand Iphis, mes plus chères délices, vint à mourir : c’était, sur ma parole, un vrai bijou, un enfant charmant, ayant tout pour lui. Tandis que sa pauvre mère s’abandonnait à sa douleur, et que nous étions plusieurs auprès d’elle occupés à la consoler, tout à coup des sorcières[3] firent entendre au dehors un bruit semblable à celui de chiens qui poursuivent un lièvre. Nous avions alors parmi nous un Cappadocien, homme de haute taille et d’un courage