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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/179

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torieuse des plus épaisses ténèbres, nous indiqua la route que nous cherchions. Arrivés au logis, nouvel embarras. Notre vieille hôtesse, qui avait passé la nuit à boire avec des voyageurs, dormait si profondément, qu’on aurait pu la brûler vive sans la réveiller. Nous courions donc grand risque de coucher à la porte, si le hasard n’eût conduit en ce lieu un des messagers de Trimalchion. Cet homme, riche pour son état (il possédait dix chariots), se lassa bientôt d’appeler en vain, et, brisant la porte de l’auberge, il nous fit entrer avec lui par la brèche. Je ne fus pas plutôt dans ma chambre, que je me mis au lit avec mon cher Giton. Le repas succulent que je venais de faire avait allumé dans mes veines un feu dévorant que je ne pus éteindre qu’en me plongeant dans un océan de voluptés :

Dieu d’amour, quelle nuit ! quels transports ravissants !
Rien ne pouvait calmer la fièvre de nos sens ;
Nos lèvres s’unissaient dans des baisers de flamme,
__Et, pour jouir, nous ne formions qu’une âme.
Ah ! que ne puis-je encore, au gré de mon désir,
______Dans les bras de ce que j’aime,
______Goûter ce bonheur suprême,
______Et mourir à l’instant même,
______Mais y mourir de plaisir !

J’avais tort, cependant, de me féliciter de mon sort ; car, profitant du sommeil léthargique où le vin m’avait plongé,