poëte il substitua son petit manteau ; puis, voyant qu’il commençait à se calmer, pour dernier lénitif il le prit dans ses bras et le couvrit de baisers : — O mon père ! mon tendre père ! s’écria-t-il, notre sort est entre vos mains. Si vous aimez un peu votre petit Giton, commencez par le sauver. Plût au ciel, hélas ! que je fusse dévoré par les flammes ; plût au ciel que la mer orageuse m’engloutît ! moi qui suis l’unique sujet, la seule cause de ces criminels débats ; du moins, ma mort rapprocherait deux amis que j’ai brouillés. — Eumolpe, touché de mes maux et de ceux de Giton, attendri surtout par les caresses que lui avait prodiguées cet aimable enfant : — Fous que vous êtes, nous dit-il, avec le mérite que vous avez, vous pourriez vivre heureux, et cependant vous passez votre misérable existence dans des inquiétudes continuelles : chaque jour vous vous créez à vous-mêmes de nouveaux chagrins.
Pour moi, toujours et partout, j’ai vécu comme si chaque jour dont je jouissais était le dernier de mes jours et ne devait jamais revenir, c’est-à-dire sans m’inquiéter du lendemain[1]. Suivez donc mon exemple, et narguez les soucis. Ascylte vous poursuit ici ; fuyez au plus tôt. Je suis sur le point de faire un voyage dans un pays lointain ; venez avec moi : le vaisseau sur lequel je dois m’embarquer mettra peut-être à la voile cette nuit : je suis connu des gens de l’équipage, et nous serons bien reçus. Ce conseil me parut sage et utile ; il me