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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/211

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poëte il substitua son petit manteau ; puis, voyant qu’il commençait à se calmer, pour dernier lénitif il le prit dans ses bras et le couvrit de baisers : — O mon père ! mon tendre père ! s’écria-t-il, notre sort est entre vos mains. Si vous aimez un peu votre petit Giton, commencez par le sauver. Plût au ciel, hélas ! que je fusse dévoré par les flammes ; plût au ciel que la mer orageuse m’engloutît ! moi qui suis l’unique sujet, la seule cause de ces criminels débats ; du moins, ma mort rapprocherait deux amis que j’ai brouillés. — Eumolpe, touché de mes maux et de ceux de Giton, attendri surtout par les caresses que lui avait prodiguées cet aimable enfant : — Fous que vous êtes, nous dit-il, avec le mérite que vous avez, vous pourriez vivre heureux, et cependant vous passez votre misérable existence dans des inquiétudes continuelles : chaque jour vous vous créez à vous-mêmes de nouveaux chagrins.


CHAPITRE XCIX.

Pour moi, toujours et partout, j’ai vécu comme si chaque jour dont je jouissais était le dernier de mes jours et ne devait jamais revenir, c’est-à-dire sans m’inquiéter du lendemain[1]. Suivez donc mon exemple, et narguez les soucis. Ascylte vous poursuit ici ; fuyez au plus tôt. Je suis sur le point de faire un voyage dans un pays lointain ; venez avec moi : le vaisseau sur lequel je dois m’embarquer mettra peut-être à la voile cette nuit : je suis connu des gens de l’équipage, et nous serons bien reçus. Ce conseil me parut sage et utile ; il me