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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/217

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CHAPITRE CII.

Trêve, m’écriai-je, à ces timides conseils ! n’ayons recours qu’à l’audace ; laissons-nous couler dans la chaloupe le long du câble ; coupons-le, et abandonnons le reste au hasard. Cependant, cher Eumolpe, mon intention n’est pas de vous associer à nos périls : il n’est pas juste que l’innocent s’expose pour le coupable. Tous mes vœux seront comblés, si la Fortune seconde notre fuite. — Excellent avis ! dit Eumolpe, s’il était praticable. Espérez-vous donc que personne ne s’apercevra de votre départ ? Échapperez-vous aux regards du pilote, qui, toujours éveillé, passe la nuit à observer le cours des astres ? Et quand bien même il viendrait à s’endormir, vous ne pourriez vous flatter de tromper sa vigilance qu’en vous échappant par le côté du vaisseau opposé à celui où il se tient ; mais c’est à la poupe, auprès du gouvernail, qu’est attaché le câble qui retient la chaloupe, et c’est par là qu’il vous faut descendre. Je m’étonne d’ailleurs, Encolpe, que vous n’ayez pas songé au matelot qui est de garde jour et nuit dans cette chaloupe, et que vous n’en pourrez chasser qu’en le tuant ou en le jetant à la mer de vive force. Vous sentez-vous capable d’un coup si hardi ? Consultez votre courage. Quant à moi, je suis prêt à vous suivre, et aucun danger ne m’arrêtera, pourvu qu’il y ait quelque chance de salut ; car je ne vous crois pas assez fou pour exposer votre vie de gaieté de cœur et sans aucun espoir de succès. Voyez si vous préférez l’expédient