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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/225

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qui avait eu le courage de nous infliger ce cruel supplice. — Votre fuite, disait-elle, méritait sans doute un châtiment, ingrats qui avez dédaigné les bienfaits dont vous comblait mon amour !


CHAPITRE CVI.

— Pauvre femme ! reprit Lycas transporté de fureur, vous êtes assez simple pour croire que ces lettres ont été imprimées sur leur front avec un fer chaud ! Plût aux dieux que ces marques d’infamie fussent véritables ! nous serions enfin vengés ! Mais en ce moment même on cherche à nous abuser par cette comédie, et cette inscription postiche est un nouveau tour qu’on veut nous jouer. — Tryphène, heureuse de n’avoir pas entièrement perdu son amant, penchait vers l’indulgence ; mais Lycas, qui conservait un vif ressentiment[1] de mes liaisons avec Doris, son épouse, et de l’affront qu’il avait reçu sous le portique d’Hercule, s’anima de plus en plus, et, le visage enflammé, s’écria : — Ne voyez-vous pas, ô Tryphène ! dans cet événement une preuve convaincante de la sollicitude des dieux pour les choses d’ici-bas ? C’est conduits par eux que ces coupables sont venus, sans s’en douter, sur notre vaisseau ; ce sont eux qui, pour nous en avertir, nous ont envoyé à tous deux le même songe. Voyez maintenant s’il nous est permis de faire grâce à des scélérats que les dieux mêmes ont livrés à notre justice. Pour moi, je ne suis pas un barbare ; mais je craindrais, en leur pardonnant, d’attirer sur moi la vengeance