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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/227

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notre merci ? que voulez-vous, que prétendez-vous de plus ? Vous voyez, suppliants devant vous, des jeunes gens aimables, bien nés, et, ce qui doit surtout vous toucher, des jeunes gens avec lesquels vous avez vécu naguère dans la plus étroite intimité. Certes, s’ils vous eussent volé votre argent, s’ils eussent répondu à votre confiance par la plus lâche trahison, vous seriez assez vengé par le châtiment que vous lisez sur leur front. Nés libres, ils se sont volontairement infligé, pour expier leur offense, ces marques de la servitude qui les isolent à jamais de la société. — Lycas, interrompant la défense d’Eumolpe : — N’embrouillez pas la question, dit-il, et réduisons chaque chose à sa juste valeur. Et d’abord, s’ils sont venus ici de leur plein gré, pourquoi se sont-ils fait raser la tête ? Quiconque se déguise a dessein de tromper, et non d’offrir une satisfaction. En second lieu, s’ils avaient l’intention d’obtenir leur grâce par votre entremise, pourquoi tant d’efforts pour cacher vos clients à tous les yeux ? Il est donc clair que le hasard seul les a conduits dans nos filets, et qu’ensuite vous avez cherché par vos artifices à les soustraire aux transports de notre ressentiment. Quant à ce que vous affectez de dire, pour nous intimider, que ce sont des hommes libres et de bonne famille, prenez garde de gâter votre cause par cet argument qui vous inspire tant de confiance. Que doit faire un homme offensé, lorsque le coupable court de lui-même au-devant du châtiment ? Mais, dites-vous, ils ont été nos amis. C’est par cela même qu’ils méritent un traitement plus rigoureux. Offenser un inconnu, ce n’est qu’un crime ordinaire ; mais outrager un