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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/238

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CHAPITRE CXII.

Vous savez qu’un appétit satisfait éveille bientôt de nouveaux désirs. Notre soldat, encouragé par le succès, employa, pour triompher de la vertu de la dame, les mêmes arguments dont il s’était servi pour lui persuader de vivre. Or, le jeune homme n’était ni sans esprit, ni d’un extérieur désagréable, et notre chaste veuve s’en était aperçue ; la servante, pour lui gagner les bonnes grâces de sa maîtresse, répétait souvent :

Pouvez-vous résister à de si doux penchants,
Et, dans ces tristes lieux, consumer vos beaux ans[1] ?


Enfin, pour abréger, vous saurez que la bonne dame, après avoir cédé aux besoins de son estomac, ne défendit pas mieux son cœur[2], et que notre heureux soldat obtint une double victoire. Ils dormirent donc ensemble, non-seulement cette nuit qui fut témoin de leurs noces impromptu, mais le lendemain et le jour suivant. Toutefois, ils eurent soin de fermer les portes du caveau, si bien que quiconque, parent ou ami, fût venu en cet endroit, eût pensé que la fidèle veuve était morte de douleur sur le corps de son mari. Le soldat, charmé de la beauté de sa maîtresse et du mystère de leurs amours, achetait tout ce qu’il pouvait se procurer de meilleur, selon ses moyens, et, dès que le soir était venu, le portait au tombeau. Cependant les parents d’un des voleurs, voyant qu’il n’était