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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/239

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plus gardé, enlevèrent son corps pendant la nuit, et lui rendirent les derniers devoirs. Mais que devint le pauvre soldat, qui, renfermé dans le caveau, ne songeait qu’à son plaisir, lorsque, le lendemain matin, il vit une des croix sans cadavre ? Effrayé du supplice qui l’attend, il va trouver la veuve, et lui fait part de cet événement : — Non, lui dit-il, je n’attendrai point ma condamnation, et ce glaive, prévenant la sentence du juge, va me punir de ma négligence. Daignez seulement, quand je ne serai plus, m’accorder un asile dans ce tombeau ; placez-y votre amant auprès de votre époux. — Me préservent les dieux, répondit la dame, non moins compatissante que chaste, d’avoir à pleurer en même temps la perte de deux personnes si chères ! J’aime mieux pendre le mort que de laisser périr le vivant. — Après ce beau discours, elle exige que l’on tire du cercueil le corps de son mari, et qu’on l’attache à la croix vacante. Notre soldat s’empresse de suivre le conseil ingénieux de cette femme prudente ; et le lendemain le peuple criait miracle, ne pouvant concevoir comment un mort était allé de lui-même au gibet.


CHAPITRE CXIII.

Cette histoire fit beaucoup rire les matelots ; et Tryphène, pour cacher la rougeur qui couvrait son visage[1], se penchait amoureusement sur le cou de Giton. Mais Lycas ne goûta point la plaisanterie ; et secouant la tête d’un air mécontent : — Si le gouverneur d’Éphèse eût fait justice, il eût fait repla-