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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/277

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un mot, car je craignais fort sa jalousie. Bien plus, pour dissiper tout soupçon à cet égard, je le fis coucher auprès de moi, et j’essayai de lui donner des preuves de mon amour. Mais, voyant que toutes mes tentatives, tous mes efforts étaient inutiles, il se leva furieux et me reprocha cette infirmité, qui, selon lui, provenait du refroidissement de ma tendresse. Il ajouta que, depuis longtemps, il avait acquis la certitude que je portais ailleurs mes feux et mes hommages. — Que dis-tu, frère ? m’écriais-je ; mon amour pour toi est toujours le même ; mais la raison, croissant avec l’âge, modère ma passion et mes transports. — En ce cas, répliqua-t-il d’un ton railleur, j’ai de grands remercîments à vous faire ! vous m’aimez à la manière de Socrate : jamais Alcibiade ne sortit plus pur du lit de son maître[4].


CHAPITRE CXXIX.

Ce fut en vain que j’ajoutai : — Crois-moi, frère, je ne me reconnais plus ; je n’ai plus d’un homme que le nom : elle est morte cette partie de moi-même qui naguère faisait de moi un Achille. — Convaincu de mon impuissance, et craignant que, s’il était surpris en tête à tête avec moi, cela ne donnât, sans motif, carrière à la médisance, Giton s’arracha de mes bras et s’enfuit dans l’intérieur de la maison. Á peine était-il