Aller au contenu

Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je me repentis de l’avoir faite, et j’éprouvai une secrète confusion d’avoir oublié les lois de la pudeur, au point de m’entretenir avec cette partie de mon corps à laquelle les hommes qui se respectent n’osent pas même penser. Je me frottai longtemps le front avec dépit : — Après tout, m’écriai-je, quel mal ai-je fait en soulageant ma douleur par des reproches si naturels ? Ne fait-on pas tous les jours des imprécations contre toutes les autres parties du corps humain, contre son ventre, sa bouche, sa tête, lorsqu’ils vous causent de fréquentes douleurs ? Le sage Ulysse lui-même n’a-t-il pas un démêlé avec son cœur ? Et les héros de tragédies ne gourmandent-ils pas leurs yeux, comme s’ils pouvaient entendre leurs reproches ? Le goutteux peste contre ses pieds ou ses mains, le chassieux contre ses yeux ; et, lorsque nous nous blessons aux doigts de la main, nous nous en prenons à nos pieds, en les frappant contre terre.

Froids Catons ! déridez votre front magistral ;
Le plaisir, dans mon livre, il la raison s’allie :
D’un discours sérieux la tristesse m’ennuie.
J’ai peint les mœurs du peuple ; et mon original
_____Dut respirer dans ma copie.
Qui ne connaît l’amour et ses transports charmants ?
Qui, dans un lit bien chaud, ne chérit la paresse ?
Croyons-en Épicure et sa haute sagesse,
Quand il nous peint les dieux livrés il nos penchants,
_____Et, comme nous, bercés par la mollesse.