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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/288

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désordre, et vêtue d’une robe noire qui la rendait hideuse. Elle me prit par le bras et m’entraîna, tout tremblant, hors du portique.


CHAPITRE CXXXIV.

Quels vampires, me dit-elle, ont rongé tes nerfs ? aurais-tu, en passant la nuit dans un carrefour, mis le pied sur quelque ordure[1] ou sur un cadavre[2] ? Je sais que tu n’as pas pu en venir à ton honneur, même avec Giton ; et que mou, languissant, haletant comme un vieux cheval sur le penchant d’un coteau, tu t’es épuisé en efforts inutiles. Que dis-je ? non content de te rendre coupable, tu as attiré sur moi la colère des dieux ; et tu crois que je n’en tirerai pas vengeance ! — Là-dessus elle m’entraîne dans la cellule de la prêtresse, sans que j’oppose aucune résistance, me pousse sur le lit, prend un bâton derrière la porte, et m’en frappe à tour de bras. Je n’osais pas proférer une seule parole, et, si le bâton, en se rompant au premier coup, n’eût ralenti l’élan de sa fureur, elle m’aurait, je crois, brisé les bras et la tête. Je ne pus cependant retenir mes gémissements, lorsque sa main décharnée voulut réveiller en moi la nature engourdie ; versant alors un torrent de larmes, je me renversai sur l’oreiller, et je cachai ma tête sous mon bras droit. La vieille, de son côté, s’assit sur le pied du lit, et se mit à pleurer à chaudes larmes, accusant d’une voix tremblante le destin de prolonger son inutile existence. Atti-