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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/30

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plusieurs autres, allèguent en faveur de la première opinion. Les Grecs appelaient satyriques certains drames, moitié sérieux, moitié bouffons, dans lesquels les acteurs, le visage barbouillé de lie, imitaient les danses grotesques, ainsi que les propos un peu lestes des divinités des bois, et tournaient en ridicule, dans la personne des magistrats et des riches, les véritables dieux de la terre. Ces drames eurent cours longtemps encore après Thespis : il nous en reste un modèle dans le Polyphème d’Euripide. D’après cette hypothèse, notre mot satyre vient du grec Σὰτυροϛ, Faune ou Satyre ; il doit alors s’écrire par un y.

Casaubon, Spanheim et Dacier ne manquent point d’arguments pour combattre Heinsius et Scaliger. Ils dérivent satire du latin satura (plat rempli de différents mets). Si vous demandez quelle analogie peut exister entre un plat rempli de différents mets et les satires d’Horace, par exemple, on vous répond que ce genre de poésie est farci, pour ainsi dire, de quantité de choses diverses, comme s’exprime élégamment Porphyrion : Multis et variis rebus hoc carmen refertum est. Ce raisonnement est fort ! Au compte de ces messieurs, que d’auteurs qui ne s’en doutent guère sont des Juvénals ! que de satires sont des pots-pourris ! Quoi qu’il en soit, selon cette doctrine, de satura l’on a fait satira, comme on a fait optimus d’optumus, et maximus de maxumus. Vous voyez bien que, dans ce cas, on doit écrire satire ; et que l’y est chassé par l’i [1].

  1. Les disputes de ce genre ne sont pas rares chez les savants. Le Parnasse, selon Boccalin, fut longtemps partagé entre Lambin et Manuce, pour un p : il s’agissait de savoir s’il fallait écrire consumptus ou consumtus. Que de veilles passa Politien à rechercher si l’on doit prononcer