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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/303

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d’Eumolpe : il me conseilla de ne pas prendre avec lui l’affaire au sérieux, mais de la tourner en plaisanterie. Je profitai de son avis, et j’abordai le patron avec un visage si riant, que son accueil, loin d’être sévère, fut on ne peut plus gai. Il me plaisanta sur mes bonnes fortunes, me fit des compliments sur ma bonne mine et sur ma tournure, dont toutes les dames raffolaient : — Je n’ignore pas, ajouta-t-il, qu’une de nos beautés se meurt d’amour pour toi, mon cher Encolpe : cela peut un jour nous être utile en temps et lieu. Courage ! joue bien ton rôle d’amoureux ; de mon côté, je soutiendrai le mien jusqu’au bout.


CHAPITRE CXL.

Il parlait encore, quand nous vîmes entrer une dame des plus respectables : Philumène était son nom. Dans sa jeunesse, elle avait spéculé sur ses charmes pour extorquer plusieurs successions[1] ; mais alors, vieille et fanée, elle introduisait son fils et sa fille auprès des vieillards sans héritiers, et, se succédant ainsi à elle-même, elle continuait à exercer son honnête commerce. Elle vint donc trouver Eumolpe, et recommanda à sa prud’homie et à sa bonté ces enfants, son unique espérance. Á l’entendre, Eumolpe était l’homme du monde le plus capable de donner sans cesse de sages instructions à la jeunesse. Elle finit en disant qu’elle laissait ses enfants dans la maison d’Eumolpe, pour qu’ils écoutassent ses leçons, ajoutant que c’était le plus bel héri-