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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/304

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tage qu’elle pût leur léguer. Ce qui fut dit fut fait : elle laissa dans la chambre une fort belle fille et un jeune adolescent, son frère, et sortit sous prétexte d’aller au temple faire des vœux pour son bienfaiteur. Eumolpe, si peu délicat sur cet article, que, malgré mon âge, il eût fait de moi son mignon, ne perdit pas de temps, et invita la jeune fille à un combat amoureux. Mais, comme il s’était donné à tout le monde pour un homme atteint de la goutte et d’une paralysie lombaire, il courait risque, s’il ne soutenait pas son imposture, de renverser notre plan de fond en comble. Pour ne pas se démentir, il pria la jeune fille d’avoir la complaisance de jouer le rôle de l’homme, en se plaçant sur lui ; ensuite il ordonna à Corax de se glisser sous le lit où il était couché, de s’appuyer les deux mains contre terre, et de remuer son maître avec ses reins. Corax obéit, et, par des secousses lentes et régulières, répondit aux mouvements de la jeune fille. Mais, lorsque le moment de la jouissance approcha, Eumolpe cria de toutes ses forces à Corax de redoubler de vitesse. Á voir le vieillard ainsi balancé entre son valet et sa maîtresse, on eût dit qu’il jouait à l’escarpolette. Nous éclations de rire, et Eumolpe partageait notre gaîté, ce qui ne l’empêcha pas de courir deux fois la même carrière. Quant à moi, ne voulant pas laisser mes facultés se rouiller, en restant témoin inactif d’un si doux jeu, j’avisai le frère de cette jeune fille qui regardait avidement, à travers la cloison, l’exercice gymnastique de sa sœur, et je m’approchai de lui pour voir s’il était disposé à se laisser faire. En garçon