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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/332

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les mains couvertes de pierreries, de reposer sur un lit incrusté d’écaille, d’ensevelir ses flancs dans une plume moelleuse, de boire dans des vases d’or, ou de s’asseoir sur la pourpre, de couvrir sa table de mets dignes d’un roi, ou de serrer dans ses vastes greniers toutes les moissons de l’Afrique. Mais présenter un front calme à l’adversité, dédaigner la vaine faveur du peuple, contempler, sans s’émouvoir, les épées nues : quiconque est capable d’un tel effort peut se vanter de maîtriser la fortune.


XXXI.
LA GRENADE.

Lesbie, la lumière de mon âme, m’a envoyé une grenade : maintenant je n’ai plus que du dégoût pour tous les autres fruits. Je dédaigne le coing que blanchit un léger duvet ; je dédaigne la châtaigne hérissée de dards ; je ne veux ni des noix, ni des prunes dorées qu’aimait Amaryllis[1] ; je laisse le grossier Corydon mettre un grand prix à de tels présents ! j’ai en horreur les mûres, que rougit la couleur du sang : elles rappellent, hélas ! un crime affreux, commis par l’Amour.