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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/346

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2 Garum piperatum. — Le garum était la liqueur ou sauce que l’on lirait d’un poisson nommé garon par les Grecs ; on a ensuite étendu ce nom a toutes sortes de sauces faites avec des poissons ou avec leur saumure, ce qui fait dire avec tant de raison à Manilius, liv. v, vers 671, en parlant de cette sauce :

Hinc sanies pretiosa fluit, floremque cruoris
Evomit, et mixto gustum sale temperat oris.


Sénèque dit, lettre xcvi : Garum, pretiosam malorum piscium saniem ; et Martial, liv. XIII, sur le mot Ostrea :

Ebria baiano veni modo concha Lucrino :
Nobile nunc silio luxuriosa garum.


On faisait le garum avec des entrailles de poisson confites dans le vin et le vinaigre, ou bien dans l’eau et le sel, et souvent dans l’huile ; on y mettait aussi du poivre, garum piperatum, comme le dit ici Pétrone, et quelquefois des fines herbes. Pline (liv. XXXI, chap. 3) dit que le garum fait avec le maquereau seul était le plus estimé ; mais Célius Aurelianus donne le prix au garum fait avec un poisson du Nil appelé silurus. C’était en même temps la meilleure sauce à servir avec les poissons.

De nos jours on fait aussi différentes sauces avec des poissons, entre autres la sauce d’anchois dont les Anglais font un très-grand usage.

3 Pisces, qui in Euripo natabant. — L’Euripe, comme on sait, est ce bras de mer qui sépare l’île d’Eubée ou de Négrepont de la Grèce, et qui est si resserré devant Chalcis, qu’une galère pouvait à peine y passer. Ce canal était et est encore remarquable par l’irrégularité de ses marées. Les Romains avaient donné, par extension, le nom d’Euri-pes aux canaux par lesquels ils conduisaient et distribuaient les eaux pour l’embellissement de leurs maisons de campagne. Ductus aquarum quos Euripos vocant, dit Cicéron (de Legibus, lib. II). Ils appelaient aussi Euripes les fossés dont ils environnaient leurs cirques et leurs théâtres : Civitas exstruxit theatrum, scena erat talis, et statuae super Euripum, etc. Voir Tertullien contre Hermogène. Sidonius Apollinaris, poëme XXII, v. 208 :

Fusilis Euripus propter : cadit unda superne
Ante fores pendente lacu, venamque secuti
Undosa inveniunt nantes cœnacula pisces.


Pétrone, par une hyperbole plaisante, donne ici le nom d’Euripe à ces