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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/359

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térieur à la guerre de Troie. Ce fut l’an de Rome 608, cinquante-sept ans après qu’Annibal eut quitté l’Italie, que les Romains prirent Corinthe et la livrèrent aux flammes. On prétend que, du mélange des métaux qui se fondirent dans l’embrasement de cette ville, se forma le bronze de Corinthe.

CHAPITRE LI. 1 Fuit tamen faber, qui fecit phialam vitream, quæ non frangebatur. — Parmi les découvertes que nous devons aux anciens, il en est peu de plus utiles pour les commodités et les agréments de la vie que l’invention du verre. Cette découverte est due au hasard, et remonte à mille ans environ avant l’ère chrétienne. Pline dit que des marchands de nitre, qui traversaient la Phénicie, s’étant arrêtés sur les bords du fleuve Bélos pour y faire cuire leur nourriture, mirent, à défaut de pierres, des morceaux de nitre pour soutenir leurs vases, et que ce nitre, mêlé avec le sable, se fondit à la chaleur du feu, et forma une liqueur claire et transparente qui, s’étant figée, donna la première idée de la façon du verre.

Il est d’autant plus étonnant que les anciens n’aient pas connu plus tôt l’art de rendre le verre propre à transmettre la lumière dans leurs maisons, et à conserver la représentation des objets, en appliquant l’étain derrière les glaces, que les progrès de la découverte du verre furent chez eux portés fort loin. En effet, quels beaux ouvrages n’ont-ils pas faits avec cette matière ! Quoi de plus superbe, par exemple, que ces colonnes de verre, d’une hauteur et d’une grosseur prodigieuses qui décoraient le temple de L’île d’Aradus ? Mais le plus fameux ouvrage en verre est le théâtre que Seaurus fit construire, pendant qu’il était édile : ce théâtre avait trois étages ornés de trois cent soixante colonnes. Le premier étage était tout de marbre ; le deuxième, tout incrusté de verre en mosaïque, ornement jusqu’alors inconnu, et qui n’a jamais été imité depuis ; le troisième était de bois doré. Les colonnes du premier étage avaient 13 mètres environ de hauteur ; trois mille statues de bronze, placées entre les piliers, rendaient ce théâtre le plus noble et le plus somptueux que l’on ait jamais vu.

Quant à l’histoire racontée par Trimalchion au sujet du verre malléable, elle ne mérite aucune croyance. C’était un conte déjà usé chez les anciens, et dont les hommes instruits se moquaient. Cependant, il paraît qu’on y croyait encore du temps de Pline l’Ancien, qui place cette invention sous le règne de Tibère. Voyez livre xxxvi, chapitre 26, où il assure qu’on se contenta de ruiner la boutique et les instruments de l’ouvrier. D’autres auteurs, comme Dion, livre LVII, et Isidore, livre XVI, chapitre 15. prétendent qu’on fit mourir l’inventeur.