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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/364

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lieu de billets blancs, comme dans les nôtres, on y mettait des sentences extravagantes ou des choses de nulle valeur, pour se moquer de ceux à qui ces billets tombaient en partage. Suétone, dans la Vie d’Auguste, chapitre 75, en donne des exemples : « Aux Saturnales, dit-il, et même en d’autres occasions où il voulait se divertir, cet empereur faisait des loteries où il mettait des habits magnifiques, de l’or, de l’argent, quelquefois des médailles ; puis des éponges, des pelles à feu, des pincettes, des tuniques de poil de chèvre, et des lots encore plus bizarres. »

Le même historien dit que Néron faisait en particulier de semblables loteries, et que dans les fêtes qu’il célébra pro œternitate imperii, pour l’éternelle durée de l’empire, il en ouvrit de publiques, où il fut, selon sa coutume dans ces sortes d’occasions, généreux et prodigue à l’excès. Il faisait jeter au peuple mille billets par jour, dont quelques-uns renfermaient des lots assez considérables pour faire tout d’un coup la fortune de ceux entre les mains desquels ils tombaient. Louis XIV donna quelquefois le même divertissement à sa cour ; mais la dignité naturelle du prince n’y admettait que des accessoires convenables à la majesté du trône.

2 Argentum sceleratum ! — L’argent est appelé ici sceleratum, c’est-à-dire : causa omnium scelerum.

.   .   .   .   .   Quid non mortalia pectora cogis
Auri sacra fames ?


a dit Virgile. On donnait à Rome le nom de sceleratus, non-seulement aux personnes qui commettaient des crimes, mais aux choses inanimées. C’est ainsi qu’on appelait porte Scélérate la porte Carmentale, par où étaient sortis les trois cent six Fabiens qui furent tous tués par les Étruriens ; et rueScélérate,celle dans laquelle la femme de Tarquin fit passer son char sur le corps de son père.

3 Seriphia et contumelia ! — Il y a dans ce passage une foule de jeux de mots et de mauvaises plaisanteries dont le sens est souvent inintelligible. Cependant nous avons quelquefois réussi à les comprendre : tel est, par exemple, le rapport de son, intraduisible en français, qui existe entre contumelia, des outrages, et contus cum malo, un croc et une pomme ; le rapport de forme entre porri, des poireaux, et flagellum, un fouet ; entre canalem et pedalem un canal et une mesure d’un pied, et lepus et solea, un lièvre et une pantoufle. Mais entre les mots murœnam et litteram, et murem cum rana alligatum et fascem betœ, le jeu de mots est encore plus facile à saisir : murœna, en effet, renferme, à une lettre près, mus et rana. Pour comprendre l’analogie qui existe entre litteram