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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/398

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riennes défendaient aux jeunes gens des deux sexes de se marier avant d’avoir coupé leurs cheveux, et de les avoir appendus dans le temple de Bélus, en l’honneur de l’immortel brochet Oannès. Tous les mariages se faisaient donc à Babylone, en perruque. Le même usage avait lieu chez les Grecs de Trézènes ; mais là, c’était au pudique Hippolyte qu’étaient consacrées les dépouilles des têtes vierges. Voyez Histoire de la déesse de Syrie, faussement attribuée à Lucien.

« Héritiers des arts, enfants de l’Égypte et de la Phénicie, les Grecs ne pouvaient manquer d’être excellents perruquiers. La perruque se nommait chez eux phènaxè (imposture) ; c’est Ménage qui nous l’apprend. Et qu’est-ce en effet qu’une perruque, sinon l’officieux mensonge d’une chevelure artificielle ? D’après quelques passages de Thucydide (Préface de la Guerre du Péloponnèse), on voit que les jeunes Athéniennes préféraient, parmi les perruques, celles dont les tresses blondes, repliées sous un réseau transparent, s’y cachaient à moitié pour briller davantage. D’autres aimaient à ramener ces tresses sur le sommet du front, où des aiguilles d’or les tenaient arrêtées. La tête de ces aiguilles avait la forme de cigales auxquelles il ne manquait que la voix, et qui, dans un balancement perpétuel, semblaient toujours prêtes à s’envoler. Les petits-maîtres, du temps d’Aristophane, avaient mis à la mode la coiffure d’enfant, ou la perruque à la jockei : c’était celle de l’efféminé Cratinus ; et, si l’on en croit Ovide, Sapho, pour plaire à Phaon, plaçait dans sa perruque des poinçons garnis de perles.

« Il est évident qu’à Rome la mode des perruques était devenue générale vers les derniers temps de la république. Tibulle, Ovide, Properce et Gallus ont chanté les perruques de leurs maîtresses, dans une foule de jolis vers. Il fallait, dit un grave académicien (l’abbé Nadal, Dissertation sur le luxe des dames romaines), il fallait, pour l’ornement d’une tête romaine, les dépouilles d’une infinité d’autres têtes. Tantôt les cheveux flottaient sur les épaules au gré des vents, tantôt ils s’arrondissaient en boucles sur un sein d’albâtre. Souvent on en tressait des couronnes ; quelquefois ils s’élevaient à pic, et laissaient à découvert l’ivoire d’un joli cou. Ce fut Plotine, femme de Trajan, qui introduisit à Rome ces perruques à l’Andromaque, dont parle Juvénal dans sa sixième satire. Elles s’élevaient par étages sur le devant de la tête, et formaient une espèce de turban à triple rouleau : c’était la coiffure favorite des femmes à petite taille. L’illustre Adrien Valois a recueilli quatorze médailles d’impératrices romaines ; et, sur chacune de ces médailles, on voit une perruque différente. Les dieux même honoraient les perruques d’une protection spéciale. Les prêtres de Diane, selon saint Maxime