Aller au contenu

Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/416

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conjecture, et j’aime mieux m’en tenir aux manuscrits de Plolémée. On ne niera pas, je pense, que mon explication ne donne plus d’agrément à ce passage. La découverte de la Grande-Bretagne était toute nouvelle dans le temps des brouilleries de César et de Pompée. De la manière dont le premier a décrit cette grande île, il paraît que l’on en avait déjà fait le tour de son temps ; c’est ce que notre poëte a donné à entendre en parlant des plus reculés de ces insulaires. L’épithète de gravidisleur convenait à merveille ; elle signifie tout ce qui est gros et pesant, comme dans Cicéron (dela Divination, liv. I, ch. 11) :

Aut quum se gravido tremefecit corpore tellus ;


dans Virgile (Énéide, liv. VII, ) : Stipites hic gravidi nodis ; et dans Fulgence (Mytholog., liv. I) : Erat gravido, ut apparebat, corpore. Or, telle était la taille des anciens Bretons, selon le témoignage, non-seulement de Pausanias, mais encore de Strabon, livre IV, qui dit qu’ils étaient Kaunoteroi tois sômasi. Il ne reste donc plus de difficulté dans ce passage. »

Ne voilà-t-il pas, je le demande, bien de l’érudition dépensée en pure perte ? Quel besoin y avait-il, pour l’intelligence de ce passage, de recourir à Pausanias, à Strabon, et à tant d’autres écrivains tant anciens que modernes, lorsque le sens est si clair par lui-même ? gravidis est ici pour onustis. Quelle invraisemblance peut-on trouver a ce que, même du temps de César, il y eût sur la mer des vaisseaux pesamment chargés, puisque l’auteur dit lui-même qu’on allait chercher tous les raffinements du luxe de l’un à l’autre pôle, eu Assyrie, dans l’Inde, chez les Numides, chez les Arabes, et jusque chez les Serres, peuple de la Chine ? Du moment qu’il y avait des vaisseaux, pourquoi donc n’auraient-ils pas été pesamment chargés ?... Quant à ces mots freta pressa, ils ne veulent pas dire, comme le suppose Bouhier, que toutes les mers fussent couvertes de vaisseaux, car on sait que les anciens ne s’éloignaient guère des côtes, mais simplement qu’elles étaient foulées par les vaisseaux, comme on lit plus haut dans leSatyricon,chapitre lxxix :classes premunt mare ;et dans Horace :premere littus,côtoyer le rivage.

3 Non usu plebeio trita voluptas. — Quelques commentateurs lisent risu plebeio tracta voluptas, ce qui n’offre aucun sens raisonnable, tandis que usu plebeio trita voluptas, rappelle ce passage de Sénèque (lettre CXXI) : Res sordida est, trita ac vulgari via vivere.

4 Hinc Numidae adtulerant, illinc nova vellera Serres ; Atque Arabum populus sua despoliaverat arva. — Mon beau-père, M. de Guerle, a