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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/80

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dre. Soudain, Ascylte et Giton de fuir vers la ville à travers les buissons, et moi de rebrousser chemin. La peur me donnait des ailes. Dans la chaleur de la course, ma chère robe, dépositaire de mon or, avait glissé de dessus mes épaules, sans que je m’en aperçusse. Bientôt, rendu, hors d’haleine, je m’étends au pied d’un arbre, pour respirer un peu. Alors seulement mes yeux s’ouvrent sur ma perte : la douleur me rend mes forces ; je me lève pour chercher mon trésor. Temps perdu ! peine inutile ! le corps brisé, le désespoir dans l’âme, je m’enfonce au plus fort du bois. Là, quatre heures entières, je reste seul, absorbé dans ma mélancolie. Cependant, pour m’arracher aux sombres pensées que m’inspirait cette affreuse solitude, je cherche une issue pour en sortir. À quelques pas de là, un campagnard s’offre à ma rencontre. J’eus besoin alors de tout mon courage, et, par bonheur, il ne fut point en défaut. J’aborde mon homme d’un air ferme : — Depuis tantôt, lui dis-je, égaré dans cette forêt, je cherche vainement le chemin de la ville ; voulez-vous bien me l’enseigner ? — J’étais plus pâle que la mort, et crotté jusqu’à l’échine. Mon état lui fit pitié. Après m’avoir demandé si je n’avais rencontré personne dans la forêt, il se contenta de ma réponse négative, et me remit obligeamment sur la grande route. Nous allions nous quitter, quand deux de ses camarades vinrent lui faire ce rapport : — Nous avons en vain battu le bois jusqu’en ses derniers recoins ; nous n’avons rien découvert, si ce n’est cette méchante tunique que voici. — On se figure sans peine que je n’eus pas l’audace de la réclamer, quoique j’en connusse le