Page:Pages choisies, par Herbert George Wells, 1931.pdf/13

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en mouvement des foules dans un monde bouleversé. La chute des cylindres marsiens autour de Londres provoque d’abord la surprise et la curiosité ; puis, quand ces êtres, juchés dans leurs étranges mécaniques, se livrent, sans autre forme de procès, à des hostilités contre lesquelles sont impuissantes nos défenses terrestres, c’est la panique. La fuite affolée des habitants de Londres devant les terrifiants envahisseurs est décrite avec un réalisme si poignant qu’on croirait lire le récit d’un témoin oculaire. C’est une fresque immense, à grandes lignes nettes, où les détails précis abondent sans créer de confusion. Tout est raconté avec simplicité, sur un ton d’émotion ineffaçable, avec un "humour qui feint de s’ignorer et que sa discrétion rend singulièrement plus efficace. Par contraste avec cet infernal grouillement, rien n’est plus saisissant que la promenade du héros narrateur à travers les rues de Londres, désertes, silencieuses, et en partie saccagées. Quelques mois plus tard, en 1899, H.-G. Wells donnait un autre roman anticipateur, Quand le Dormeur s’éveillera (1), où, de nouveau les cohues, le tumulte des multitudes insurgées forment des tableaux d’épopée. Après plus de deux siècles de catalepsie, le Dormeur s’éveille. Du seul fait de son ’existence prolongée, les intérêts qu’il possédait dans certaines entreprises lui assurent la propriété d’une vaste partie des industries et des finances de la terre ; c’est en son nom qu’un oligarchique comité gouverne le monde et maintient les masses en servage. Une ’féroce domestication est l’aboutissement du système social actuel. C’est le prétexte pour Wells d’animer des « scènes de la vie future » qui dépassent tout ce que Georges Duhamel a pu redouter devant la mécanisation des Etats-Unis. La vie est complètement (1) Traduit par Henry D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de

France.