Page:Pages choisies, par Herbert George Wells, 1931.pdf/15

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

discerner ce à quoi on parviendra le lendemain, ou dans dix, vingt ou cinquante ans. D’après le bilan du le budget du siècle qui il suppute terminé, siècle y écoulés, sont Aujourd’hui, trente ans se commence. et sa clairvoyance fut si lucide, si sagace, que ses prédictions ne cessent de se réaliser l’une après

l’autre.

Chaque tranche mensuelle de ces Anticipations était attendue avec impatience par le public, tandis passionnées discussions à des livrait la se presse que sur la précédente. Dès que les douze articles paraissent polédes s’élève ; s’étend débat et le volume, en miques surgissent, des controverses s’enchevêtrent dans la presse populaire comme dans les plus graves quotidiens. Les périodiques s’en mêlent et l’admiration pour l’anticipateur est unanime. Bientôt l’idée est lancée qu’outre bon poète lauréat, l’Angle-

terre se doit d’avoir un « prophète-lauréat » qui serait

Wells, avec mission d’appliquer sa surnaturelle

clairvoyance à l’examen critique des projets parlementaires et des initiatives de l’État. Son discernement, qui tient du prodige, lui permettra d’en signaler ,

les développements fâcheux ou bienfaisants, les conséquences heureuses ou funestes. Mais dans nos vieux pays d’Europe, les meilleures idées n’ont aucune chance d’être mises à exécution si elles ne sont pas soutenues par les précédents ou par la rou-

tine, et aucune bureaucratie n’a l’emploi d’une intelligence sagace qui puisse stimuler des gouvernements de politiciens empiriques ou leur crier casse-cou. Que l’idée était excellente, la preuve n’a cessé d’être administrée depuis lors, et elle l’est chaque jour encore à quiconque lit ou relit ce recueil de prévisions pratiques, de déductions judicieuses qui se réalisent souvent beaucoup plus tôt que le prophète ne l’annonçait. Il va de soi que le gouvernement ignora le vœu