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L’ŒUVRE DE VAUVENARGUES.

contredis toujours jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il est un monstre incompréhensible. »

Vauvenargues ne craint pas d’opposer à ces grandes paroles cette maxime : « Il n’y a point de contradictions dans la nature[1] ». Croyait-il, en s’exprimant ainsi, pouvoir supprimer les faits dont Pascal avait triomphé, ces contrastes de noblesse et de misère, ces antithèses de vérité et d’erreur, ces inconséquences, cette confusion, cet « embrouillement » perpétuel de notre être ? Non, mais il prétendait les concilier. Il avait une foi profonde dans une harmonie supérieure, et il s’efforçait de la réaliser en lui-même. Sa pensée s’y appliquait sans cesse. Il considérait d’abord qu’une sincérité absolue était la condition nécessaire de ce travail. « Les faux philosophes, disait-il, s’efforcent d’attirer l’attention des hommes en faisant remarquer dans notre esprit des contrariétés et des difficultés qu’ils forment eux-mêmes, comme d’autres amusent les enfants par des tours de cartes qui confondent leur jugement, quoique naturels et sans magie. Ceux qui nouent ainsi les choses, pour avoir le mérite de les dénouer, sont les charlatans de la morale[2]. » Le meilleur moyen de dégager la vérité du conflit des apparences lui semblait ensuite de s’attacher au

  1. Maximes, 289.
  2. Ibid., 288.