Page:Paléologue - Vauvenargues, 1890.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
120
VAUVENARGUES.

chaleur ; mais c’est un défaut où l’on tombe presque inévitablement lorsqu’on n’est animé que d’une chaleur empruntée ».

Une même admiration, à laquelle s’ajoutait une particulière et intime sympathie, attirait Vauvenargues vers Fénelon. L’âme tendre et touchante qui s’épanchait dans le Télémaque parlait à son cœur ; la grâce persuasive de ce style naturel, abondant et mélodieux charmait son esprit.

Ces qualités heureuses, dont il portait en lui le principe, exercèrent sur son talent une influence dont la trace se suit aisément. Ne croit-on pas reconnaître la riante imagination du Cygne de Cambrai dans cette pensée : « Les premiers jours du printemps ont moins de grâce que la vertu naissante d’un jeune homme » ?

Notons aussi que, comme pour Bossuet, Vauvenargues estimait en Fénelon autant l’homme d’action que l’homme de parole et de pensée ; car, sous les apparences pleines d’onction et d’aménité de l’archevêque de Cambrai, il avait aperçu ce que l’on a trop négligé de voir depuis, c’est-à-dire une nature très passionnée et secrètement ambitieuse des plus hauts emplois. « Vous qui vous êtes montré si ami de la modération dans vos écrits, lui fait-il dire par Richelieu dans un de ses Dialogues des Morts, ne vouliez-vous pas vous insinuer dans les esprits, faire prévaloir vos maximes ?… Vous vouliez assu-