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Page:Paléologue - Vauvenargues, 1890.djvu/141

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SA PART DANS L ŒUVRE DU XVIIIe siècle

lement pour exprimer les sentiments de son cœur[1] ! »

Ce qu’il plaçait bien au-dessus de l’esprit, ce qu’il appréciait par-dessus tout, c’était l’âme. Ayez une âme, fortifiez-la, élevez-la sans cesse, et vous excellerez sur les autres hommes, vous les dominerez, vous serez grand poète, grand orateur, grand capitaine, grand ministre ; non seulement la vie vous procurera les jouissances supérieures du prestige et de la gloire, mais la mort même n’éteindra pas votre action ; car l’âme seule laisse sa trace dans le monde et triomphe du temps. En tous points, d’ailleurs, la nature de Fontenelle était antipathique à celle de Vauvenargues. L’auteur des Dialogues des Morts avait jeté le ridicule sur les passions et rabaissé les grands hommes : Vauvenargues a glorifié les unes et exalté les autres. Fontenelle affectait de mépriser la poésie tout en la cultivant, et ne voulait voir dans l’art d’écrire en vers qu’une habitude élégante, un simple amusement d’esprit : Vauvenargues a proclamé la supériorité du génie poétique, parce qu’il est tout-puissant sur les âmes, parce qu’il les éclaire et les illumine, parce qu’il leur dévoile les mystères sublimes du sentiment. Les plus belles vérités de l’univers n’avaient été pour Fontenelle que de

  1. Réflexions sur divers sujets.